Le Forum des chefs d'entreprise a adressé au gouvernement un certain nombre de propositions de nature, semble-t-il, à conforter le processus du développement national. Ces propositions concernent notamment le logement, la mise à niveau des entreprises, le crédit bancaire et le dossier des pertes de change. Le logement Pour le Forum des chefs d'entreprise, une véritable stratégie de rupture qui intégrerait définitivement ce secteur dans la logique des réformes en cours apparaît nécessaire. Une telle stratégie devrait, en particulier, restaurer l'Etat dans ses prérogatives de puissance publique et opérer une distinction nette et transparente entre son action sociale et l'activité économique (production du logement au meilleur rapport coût/qualité, loyer économique, etc.) qui est l'affaire de l'entreprise, qu'elle soit publique ou privée. Le déficit en logements, parce qu'il traduit une demande non solvable, s'exprime et continuera encore de s'exprimer sur le moyen terme, principalement en direction du logement à caractère social. En conséquence, si l'Etat doit continuer à assurer le rôle moteur en matière de construction de logements, il importe par-dessus tout de maintenir une aide directe pour l'accès au logement en faveur des couches les plus pauvres. Dans ce contexte, et par delà le maintien des formules d'aide actuelles, il serait raisonnable d'envisager une formule basée sur un taux d'intérêt zéro qui serait largement ouvert et qui permettrait d'encourager plus fortement la promotion immobilière à travers le pays. Nécessité d'un programme national de mise à niveau Le FCE est convaincu de la nécessité pour l'Etat, à l'image de ce qui a été entrepris en Tunisie, d'engager, dans les meilleurs délais, un programme sérieux de mise à niveau technologique, organisationnel et en management de nos entreprises. La proposition faite par le forum vise la mise à niveau, à moyen terme, de quelque 6 000 à 7 000 entreprises (en moyenne, 1 000 entreprises chaque année), dans le cadre d'un programme spécial d'aide à la mise à niveau à mettre sur pied pour une enveloppe pluriannuelle globale de 50 milliards de DA, et qui prévoirait diverses modalités de prise en charge pour le diagnostic, la formation, la certification et autres investissements immatériels, les équipements informatiques les équipements nouveaux de production… Crédit bancaire et charges Le taux du crédit actuellement pratiqué sur les financements de l'investissement comme de l'exploitation courante des entreprises est jugé encore trop élevé. Cette situation est anormale, aux yeux du forum, pour deux séries de raisons : d'une part, des raisons objectives liées à la bonne tenue des grands équilibres économiques et financiers du pays, à un taux d'inflation qui, au cours des dernières années, s'est maintenu à des niveaux très bas (autour de 2% en moyenne) et à une situation favorable au niveau des grandes banques publiques après leur assainissement par le Trésor ; d'autre part, la nécessité pour les pouvoirs publics de donner un signal plus clair aux investisseurs en donnant un contenu plus concret à leur volonté de soutenir et de fouetter la croissance économique. Le crédit à l'investissement devrait, ainsi, être ramené à un taux raisonnable situé entre 4 et 5%. Pour le dossier de l'allégement des charges pesant sur les entreprises, le forum réitère des propositions qu'il a faites depuis longtemps, à savoir : suppression des taxes qui pénalisent la création d'emplois : taxe professionnelle ; versement forfaitaire ; taxe d'apprentissage ; suppression de la double imposition en matière d'IBS et instauration d'un taux unique simplifié de la TVA, à hauteur de 10% pour l'ensemble des activités économiques. Hydrocarbures Le forum insiste particulièrement sur la nécessité que ce secteur soit mieux ouvert en direction des investisseurs privés nationaux qui souhaiteraient s'impliquer dans l'exploitation industrielle et commerciale des nombreuses activités qui viennent en aval de la production des hydrocarbures liquides ou gazeux. Un des signaux les plus attendus, en la matière, serait celui d'une politique tarifaire en amont qui soit avantageuse pour l'ensemble des activités consistant à valoriser localement une matière première aujourd'hui exportée à l'état brut pour servir à la fabrication à l'étranger de produits finaux multiples que notre pays importe en masse et à grands frais. La pratique d'un prix avantageux de la matière première “énergie” pour les investisseurs qui interviennent dans le processus de sa valorisation est largement répandue de par le monde, y compris dans les pays les plus développés. Couverture du risque de change Le forum formule trois propositions : installation effective de bureaux de change, par ailleurs légalement prévue ; cette mesure d'assainissement de la gestion des devises est attendue aussi bien par l'entreprise que par le citoyen ; mise en place, au niveau des banques, d'un instrument permettant aux entreprises de se couvrir contre les fluctuations erratiques du taux de change. Cet instrument apparaît indispensable dans le contexte actuel d'ouverture de notre économie et possibilité pour les banques de gérer directement une partie des ressources en devises, notamment celles liées aux exportations hors hydrocarbures et celles liées aux transferts des travailleurs étrangers. Le dossier des pertes de change Le Forum des chefs d'entreprise estime qu'il est temps que ce dossier soit traité de manière définitive. Même en tenant compte du traitement partiel des pertes de change par les autorités, le résultat en est que l'emprunt d'un dinar en 1990 a généré l'équivalent de 70 DA en service de la dette, à ce jour. Le forum propose deux mesures, à ce titre : un gel immédiat des agios générés par les pertes de change ; l'effacement des pertes de change pour l'ensemble des projets d'investissement concernés, sur la base d'un traitement au cas par cas. L'effacement des pertes de change subies par les investisseurs privés occasionnerait un coût estimé à 40 milliards de DA, à rapprocher des montants consacrés par l'Etat à l'assainissement des entreprises publiques économiques. M. R.