Ils parleront d'histoire, mais aussi de politique intérieure, en léthargie depuis avril dernier. Selon un communiqué du FFS rendu public hier, Hocine Aït Ahmed, Abdelhamid Mehri et Mouloud Hamrouche seront réunis, dimanche 31 octobre, à Alger, pour une conférence sur Novembre et les “mutations politiques et sociales” qu'il a générées. Il s'agira pour les trois personnalités d'“évaluer les succès, les échecs, les blocages” et de “livrer leurs témoignages et confronter leurs analyses, loin de la complaisance autant que des réquisitoires convenus des pratiques politiques dévoyées”. Initiée par le Front des forces socialistes, cette rencontre de haut niveau s'inscrit dans l'esprit de Novembre (“Un bilan et un élan pour l'avenir”), mais se permettra, indubitablement, une extension vers le destin d'avril. Ce destin que, chacun de son côté, avait prédit par le pronostic d'une compétition irrémédiablement fermée. Aït Ahmed, Mehri et Hamrouche vont, certes, parler de la Révolution. leur association en veillée ramadanesque ne saurait, néanmoins, se limiter aux embrassades et à des amicales retrouvailles d'un mois sacré aussi politiquement morne que ses précédents. De par l'opposition des “itinéraires”, et le “partage des expériences et des échecs”, ils devraient conclure par une initiative à même de secouer la morbide atomisation du champ politique, une des rares parties visibles de l'onde de choc de la dernière élection présidentielle. D'autant que leur poids est immensément important. À des époques non éloignées, le président du FFS a tenté la manœuvre, d'abord avec l'ancien secrétaire général du FLN, ensuite avec l'ancien Chef du gouvernement. En janvier 1995, avec Mehri, il discute puis signe, en compagnie de nombreuses autres personnalités (Ahmed Ben Bella, Ali Yahia Abdenour, Louisa Hanoune, Abdellah Djaballah, etc.) et des représentants du FIS dissous, la plate-forme de Sant'Egidio, à Rome, revendiquant une “solution politique globale” à la crise qui venait d'éclater. Au printemps 1999, avec Mouloud Hamrouche, il fait partie des cinq candidats à la magistrature suprême à se retirer de la course, une journée avant la tenue du scrutin, pour protester contre “une fraude anticipée”. C'est donc l'une des rares fois qu'ils se rencontreront à trois. Cependant, depuis l'arrêt du processus électoral de janvier 1992, leurs idées et leurs positions sur les origines de la crise ainsi que leurs propositions ont presque toujours convergé. S'ils n'ont pas été souvent des vainqueurs, ces trois personnalités représentent un concentré de premier choix des fins connaisseurs du système politique algérien et de son régime. Aït Ahmed en connaît les balbutiements, les origines et les développements ; ancien président de l'Organisation spéciale, il sera l'un des neuf historiques à déclencher la Révolution en novembre 1954. À l'indépendance, il appelle à la résistance en Kabylie avant d'être jeté en prison par le président Ben Bella. Il s'évade et prend la fuite à l'étranger où il consacre l'essentiel de son action. Il rentre au pays à de rares occasions, comme lors du congrès du FFS, en mai 2000 à Tipasa. Mehri a été, durant la guerre de Libération, membre du Comité national de la Révolution algérienne (CNRA) et du Comité d'exécution et de coordination (CEE) et ministre du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). De l'indépendance, il sera notamment ministre de l'Information, puis ambassadeur à Paris et à Rabat. En 1988, il remplace Chadli Bendjedid à la tête du secrétariat général du FLN qu'il présidera jusqu'à janvier 1996, ses pairs l'ayant évincé après sa participation au contrat de Rome. Mouloud Hamrouche, lui, a passé plusieurs années au service Protocole de la présidence de la République, surtout sous Houari Boumediene. En septembre 1989, il a été nommé Chef du gouvernement, en remplacement de Kasdi Merbah. Il démissionne de son poste suite à l'insurrection du FIS dissous. L. B.