L'un d'eux est journaliste. Il dirigeait le comité pour le boycott de la présidentielle. Les Ben Brik-Zoghlami sont devenus des habitués des tribunaux et des prisons tunisiennes. Après Toufik, c'est au tour de ses deux frères, Jalal et Madjid, de subir les foudres du régime de Ben Ali. L'un est l'autre sont en prison depuis le 22 septembre. Les chefs d'inculpation retenus contre eux dans une sombre affaire de beuverie, les font apparaître comme de vulgaires voyous. Or, c'est parce qu'ils avaient décidé d'empêcher la mascarade électorale de la présidentielle, qu'ils sont à l'ombre. Si Madjid est syndicaliste, Jalal est docteur en droit et directeur du journal “Kaws El Karama”. Rentré récemment de France, il était à la tête du comité pour le boycott de l'élection du week-end dernier qui a consacré le triomphe de Ben Ali. Des fauteurs de troubles de ce genre pouvaient s'avérer dangereux pour la bonne marche du scrutin. Aussi, les autorités tunisiennes ont-elles décidé de le mettre sous silence, son frère également, en leur taillant un procès à la mesure de la menace qu'ils représentaient. L'audience a eu lieu, mercredi dernier, soit trois jours après le scrutin. Un collectif de 22 avocats a assisté les deux prévenus, lors de leur comparution devant le juge. Parmi les défenseurs, il y avait deux représentants algériens, Maîtres Noureddine Benissad et Nordine Ahmim de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (Laadh). Selon Me Benissad, le dossier relève de la pure manœuvre. Le 22 septembre au soir, Jalal et Madjid Ben Brik se trouvaient dans un bar de l'avenue Bourguiba. Alors qu'ils s'apprêtent à payer leurs consommations, deux hommes s'approchent d'eux et leur demandent de s'acquitter d'une somme supérieure à celle qui leur est due. Ils les somment de payer le prix de 39 bières alors qu'ils n'en ont pris que six. Face à leur refus, les deux hommes optent pour la manière forte. Des renforts arrivent. Les deux frères frôlent le lynchage. Après les premiers coups, ils se précipitent dans une pizzeria voisine et s'y réfugient. C'est dans ce lieu qu'ils seront appréhendés quelques minutes plus tard par la police. Ils sont accusés de vol, de violence, de dégradation de biens d'autrui, de port d'armes blanches, de blasphème… Les délits sont graves. Ils relèvent de la juridiction pénale. Pour crédibiliser les charges énoncées, la police recourt à de multiples dépositions, dont celle du tenancier du bar. Or, ni lui ni les autres témoins ne sont présents au tribunal le jour du procès. “Cela prouve que tout a été monté de toutes pièces”, soutient Me Benissad. En attendant le verdict, jeudi prochain, le collectif d'avocats ainsi que le comité de soutien aux deux frères Ben Brik s'attellent à sensibiliser l'opinion internationale. Une pétition, lancée mercredi dernier, est signée par plusieurs personnalités et des journalistes européens et maghrébins. S. L.