Le liquidateur d'El Khalifa Bank, Moncef Badsi, a souhaité, hier, l'intervention des pouvoirs publics dans la tortueuse et très coûteuse opération de remboursement des créanciers de cette banque qui ont perdu leur argent suite à la banqueroute de cet établissement financier privé. Intervenant hier dans l'émission actuel de la Radio Alger chaîne 3, le liquidateur a tenté de rassurer quelque peu les “victimes” du crash d'El Khalifa, mais ne se fait trop d'illusion sur la lenteur du processus de remboursement. “Vous savez, c'est une opération délicate qui nécessite des vérifications et le liquidateur ne peut rien faire tout seul”, a avoué M. Badsi visiblement désarmé par l'ampleur du désastre financier sur les déposants. À une question d'un auditeur — client d'El Khalifa — sur la déclaration du président de la république, selon laquelle l'Etat serait disposé à rembourser tout le monde, le liquidateur insinuera que ce serait la meilleure solution. “Vous avez tout dit”, a-t-il simplement répondu. Une façon bien subtile de remettre la balle dans le camp des politiques dans l'espoir de régler “ce drame”. Même s'il avoue, implicitement, qu'il n'y a aucune démarche entreprise dans ce sens à l'heure actuelle, Moncef Badsi ne perd pas espoir de voir l'Etat intervenir. “Il faut rester optimiste”, se contente-il de lancer à l'adresse des créanciers. Revenant sur le chapitre des remboursements, l'invité de la chaîne 3 n'a pas apporté de bonnes nouvelles aux clients par rapport à ce qu'il avait déclaré en juillet dernier. “Nous sommes pratiquement à la même phase”. Ainsi révèle-t-il, sur les 202 000 déposants d'une enveloppe de 8,3 milliards de dinars, il reste encore 105 000 créanciers qui n'ont pas encaissé leur argent, soit une valeur globale de 7,260 milliards de dinars. M. Badsi précisera bien que le montant de remboursement ne saurait dépasser la barre des 600 000 dinars comme l'exige la réglementation, et ce, quelle que soit la cagnotte déposée dans les caisses d'El Kalifa Bank. “La caisse de garantie des dépôts bancaires ne peut malheureusement donner plus que 600 000 dinars”, regrette le liquidateur qui souhaite la révision de la loi en vigueur. S'agissant de la nature des déposants, même s'il réfute le catalogage de “petits” et “grands” déposants, Moncef Badsi précise que le nombre des clients de la première catégorie est arrêté à 88 000 et que leurs dépôts ne dépassent pas les 10 000 dinars. Mais, le plus gros “morceau” du dossier El Khalifa Bank reste incontestablement les bons de caisse. Le liquidateur ne cache pas la délicatesse d'une telle opération. Et pour cause, les sommes dues sont énormes. En effet, il y a d'après lui, 11 600 bons de caisse à payer d'une valeur de 18 milliards de dinars dont 4 600 anonymes (8 MD) et 6 950 nominatifs (9,9 MD). Tous ces bons devront, selon lui, être étudiés au cas par cas pour en vérifier l'authenticité. Cette opération s'étalerait, d'après son estimation, jusqu' à la fin du 1er semestre 2005. Il ressort de ces déclarations qu'il est pratiquement impossible de trouver tout cet argent pour rembourser les titulaires de ces bons dont la date butoir pour leur dépôt a expiré hier. Selon M. Badsi, il faudrait d'abord transformer les biens de la banque en ressources et les distribuer au prorata des dettes. En clair, les biens d'El Khalifa devraient être vendus pour pouvoir rembourser ses déposants. Cela ne réglera pas, pour autant, le problème, d'où le souhait du liquidateur d'une intervention des autorités politiques qui sont appelées à mettre la main à la poche. C'est en quelque sorte un appel du pied que lance Moncef Badsi chargé de sortir l'Algérie du bourbier d'El Khalifa. H. M.