Pendant deux heures, le ministre de l'Energie a tenté d'expliquer qu'il n'y a pas de danger, ni sur la santé ni sur l'environnement, invitant même les représentants d'In-Salah à participer au contrôle. Dépêché en pompier, jeudi dernier à In-Salah, le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, n'a pas réussi à "éteindre la flamme" rallumée par le gaz de schiste dans cette ville du Sud. En effet, il n'a pas fait mieux que les experts qui l'ont précédé la veille (mercredi, ndlr), en se contentant de défendre, devant les représentants des citoyens protestataires, le projet du premier puits d'"exploration" du gaz de schiste lancé à Ahnet. Le ministre s'est livré à un rude exercice pour tenter de convaincre les protestataires qu'il a pu réunir, suite à des négociations marathons menées, 48 heures durant, par le wali, le chef de daïra et des responsables locaux, tous les responsables locaux, que l'exploitation du gaz de schiste "ne représente aucun danger". "Il n'y a pas de danger, ni sur l'environnement, ni sur la ressource en eau et ni sur la santé humaine ou animale". Tel est le refrain qui a marqué son discours de près de deux heures, non sans rassurer à chaque passage que l'exploitation du schiste sera soumise à "un contrôle permanant et rigoureux". Dans sa tentative de raisonner les récalcitrants, M. Yousfi a même invité les représentants des habitants d'In-Salah à participer au contrôle, sur chantier, des opérations d'exploration du gaz de schiste. "J'invite les représentants des citoyens à se rendre quand ils veulent sur le site (d'Ahnet) pour contrôler et voir tout ce qui s'y fait", a-t-il exhorté son assistance, invitant les citoyens à écouter, en revanche, les experts et les techniciens de Sonatrach prêts, souligne-t-il, "à vous donner toutes les explications nécessaires sur tout le processus d'exploration et d'exploitation du gaz de schiste". Et de poursuivre : "Personnellement, je suis prêt à revenir à chaque fois que vous voulez pour débattre et dialoguer sur le sujet (gaz de schiste), et tous nos experts sont à votre disposition. Nous sommes même prêts à vous ramener des experts étrangers pour vous expliquer que l'exploitation du gaz de schiste est sans grand danger, tout comme nous pouvons vous envoyer à l'étranger pour voir les expériences des pays qui nous ont devancé dans ce domaine." Tellement convaincu que le recours au gaz de schiste est incontournable pour l'Algérie dont les réserves en énergie conventionnelle, estime-t-il, peuvent s'avérer insuffisantes pour répondre au besoin national à l'avenir, voire arriver à épuisement, vers 2030 ou 2040, le premier responsable du secteur s'est dit ne pas comprendre l'opposition des habitants d'In-Amenas à l'exploitation de ce gaz non conventionnel. "Nous souhaitons bien découvrir un deuxième gisement comme celui de Hassi-Messaoud ou de Hassi-R'mel, mais on n'en est pas là (...)", justifie-t-il. Pour lui, le gaz de schiste est "une offrande de Dieu" que les Algériens doivent accueillir avec enthousiasme tant qu'elle vient à point nommé pour palier le déficit en énergie qui se profile à l'avenir. Pour étayer ses propos, il cite l'exemple des USA en tant que premier pays à s'engager dans l'aventure du gaz de schiste et qui aspire à devenir le premier exportateur à l'horizon 2020. M. Yousfi a puisé dans toutes ses connaissances pour faire comprendre aux protestataires d'In-Amenas que l'objectif recherché par l'Etat est d'assurer de l'énergie aux générations futures et que les responsables du secteur et les experts de Sonatrach "ne sont pas fous pour s'engager dans ce domaine s'ils n'avaient pas mené des études sûres". Il précise qu'il y a des lois pour imposer des cahiers des charges stricts aux exploitants et des institutions pour contrôler vigoureusement toutes les opérations. "S'il faut contrôler l'eau une fois par semaine, nous sommes prêts à le faire. Ceux qui parlent de produits chimiques polluants se trompent (...)", a-t-il rassuré une fois de plus. M. Yousfi a tenu, par ailleurs, à souligner que "seule Sonatrach s'engage dans cette phase d'exploration du gaz de schiste, et ceux qui disent que cela profiterait aux entreprises étrangères se trompent". En fait, le ministre a tout tenté pour ramener à la raison les contestataires et renoncer à leur mouvement qui dure depuis le 1er janvier, en vain. Munis de pancartes sur lesquelles était écrit "Non, non, non au gaz de schiste", les représentants des citoyens d'In-Salah ont, pour leur part, acculé le ministre pour satisfaire leur unique revendication qui n'est ni plus ni moins que d'arrêter le chantier d'Ahnet. Pour eux, le risque zéro n'existe pas, donc il n'est pas question de débattre avant la fermeture du puits de gaz de schiste. D'ailleurs, ils n'ont pas attendu la fin de la séance pour quitter la salle. "Il joue son rôle de ministre qui a reçu des instructions pour uniquement convaincre les citoyens à geler la protestation, mais nous lui disons que nous ne sommes pas prêts à débattre avant de décider d'abandonner le puits d'Ahnet et, du moins, décréter un moratoire sur l'exploitation du gaz de schiste, car nous ne sommes pas contre de façon définitive. Cette décision prise, il faut ouvrir un débat national", a déclaré, à sa sortie de la salle, Abdelkader Bouhafsa, ingénieur en télécommunications, dont l'intervention devant le ministre a été longuement applaudie. F. A.