Sous quelque aspect qu'on la perçoit, l'entreprise de Makri se lit d'abord comme une dispersion de l'effort à un moment où la quête des synergies est pressante. C'est, pour le moins, avec étonnement et incompréhension que les partenaires du Mouvement de la société pour la paix (MSP) dans la Coordination pour les libertés et la transition démocratique (CLTD) ont découvert la teneur du discours d'Abderrezak Makri devant le conseil consultatif (Madjlis Echoura) du parti réuni jeudi et vendredi à Alger. Le président du MSP, qui, jusque-là, répondait d'un engagement infaillible au sein de la CLTD et d'un effort remarquable dans l'animation de ce pôle de l'opposition politique, a surpris plus d'un, y compris parmi les membres de l'instance délibérante du parti, en affirmant que le MSP enfourchera prochainement une initiative politique propre, laquelle se déclinera en une série de rencontres et de consultations avec les partis politiques sans exclusive ainsi qu'avec le pouvoir. La coordination pour les libertés et la transition démocratique (CLTD) se réunit aujourd'hui. Ses membres, qui ont refusé de commenter la sortie de Makri, entendent demander des clarifications quant à cette initiative politique solitaire. "En tant que parti politique, le MSP a le droit d'activer. La série de consultations annoncées n'est pas une décision de la coordination. Ça n'a pas été discuté au sein de la CLTD", a réagi Soufiane Djilali, le président de Jil Jadid et membre de la CLTD. Même prudence chez le président du RCD, Mohcine Belabbas, qui a souhaité, lui, également, ne pas commenter l'initiative annoncée par Makri qui, s'attendant à recevoir le reproche, a anticipé en soulignant que sa démarche n'est pas en contradiction avec celle de la CLTD. Mais alors pourquoi une initiative supplémentaire si elle affiche des similitudes avec la démarche de la CLTD et celle de l'Instance de concertation et de suivi (ICS) de l'opposition ? Sous quelque aspect qu'on la perçoit, l'entreprise de Makri se lit d'abord comme une dispersion de l'effort à un moment où la quête des synergies est pressante. La perspective à laquelle se rend Abderrezak Makri se comprend comme un recadrage dans la démarche et une réorientation de l'effort politique vers davantage d'investissement partisan, suite aux assauts répétés et ponctués publiquement de rappels à l'ordre de l'ancien président du parti, Abou Djerra Soltani. Ce dernier se montre, depuis un certain temps, particulièrement entreprenant, écumant les plateaux de télévision et courant les rédactions de journaux afin de porter l'estocade à son successeur à la tête du parti. Invité, la semaine dernière, de "Foutour Essabah" du journal El Khabar, Abou Djerra Soltani a carrément menacé de reprendre les rênes du parti si Abderrezak Makri poursuit d'arrimer le MSP à la dynamique de l'opposition. Il lui avait également ouvertement reproché de rendre le parti invisible sur la scène politique nationale, tant est que son action est "diluée" dans celle de la CLTD. Incontestablement, cette remarque est pour beaucoup dans la décision de Makri de lancer une initiative partisane "pour une sortie de crise" alors qu'il est déjà partie prenante de l'initiative de la CLTD qui prétend à la même finalité. Après l'initiative de la CLTD et de l'ICS et celle du FFS, à laquelle le pouvoir se déclare sensible, c'est dans une sorte de troisième voie que le MSP veut s'engouffrer. Le risque d'affaiblissement de la CLTD est bien réel, tant est que le chevauchement d'initiatives auquel travaille désormais Makri, impacterait négativement le rendement politique de l'opposition, ne serait-ce qu'en ce qu'il générerait comme confusion des rôles, laquelle pourrait dérouter les citoyens qui fondent beaucoup d'espoirs dans le regroupement de l'opposition. S.A.I.