"C'est toujours une profonde ignorance qui fonde les certitudes les plus tenaces." Ibn Sina. Aucun président algérien, depuis l'indépendance, et ils sont sept, au nombre d'années de la révolution armée. Aucun chef de gouvernement, ou premier ministre, peu importe l'appellation, depuis l'époque coloniale, et ils sont une trentaine. Aucun chef de parti, depuis l'ère du militantisme-partisan clandestin jusqu'au multipartisme autorisé, et ils sont des centaines. Aucun homme, aucune femme politique, de l'opposition comme d'el Mouwalat... aucun d'eux, aucune d'elles, avec son argent personnel, n'a créé une bibliothèque, n'a élevé un centre culturel, n'a construit un théâtre, n'a bâti une salle de cinéma... Dans les meilleurs des cas, quelques-uns, quelques-unes peut-être, ont construit des mosquées ou des écoles coraniques comme pour quémander pardon à Dieu. Comme pour racheter leurs péchés. Comme pour blanchir leur argent. Laver leurs jours crasseux devant le bon Dieu ! Sereinement, je médite sur cette situation politico-culturelle bizarre de notre classe politique, opposition comme mouwalat, et je me demande : pourquoi les Algériens ne lisent-ils pas, ou peu ? Le peuple est à l'image de sa classe politique. À l'image de ses dirigeants, ses roitelets. Et parce que la classe politique ne lit pas, le peuple suit son modèle. Aime se regarder dans son miroir. C'est rare, plutôt c'est anormal, dans un pays où tout est normal !, de tomber sur un politique, un haut responsable en exercice qui fréquente les bibliothèques. Pourquoi les Algériens ne vont-ils pas au théâtre ? Pourquoi on n'a jamais vu une pièce théâtrale algérienne, depuis l'ère socialiste jusqu'au temps politico-libéral ou libéralisé, se jouer à guichet fermé ? La classe politique, les hauts responsables du sérail, hormis le jour de la générale, personne ne franchit le seuil du théâtre ou celui d'une salle de cinéma, si salles de cinéma existent-elles encore !! Et parce que les têtes d'affiche de la classe politique ne fréquentent ni le théâtre ni le cinéma, le peuple, selon la tradition arabo-musulmane, est à l'image de ces roitelets, celles de l'opposition comme celles d'el Mouwalat. Pourquoi les Algériens ne visitent-ils pas les galeries d'art ? N'achètent-ils pas les tableaux de peinture ou peu ou n'importe comment ou n'importe quoi ? Ils préfèrent acheter les reproductions pour amocher les murs de leurs villas de béton aveugle, avec un rez-de-chaussée en série de garages ! Le marché de l'art, les valeurs des toiles et la sacralisation des signatures dans les pays civilisés, tout cela est organisé, plafonné et reconnu selon les goûts, l'appréciation et les acquisitions des têtes d'affiche de leur classe politique. Nombreux sont les hommes politiques, appartenant au monde moderne civilisé, qui sont réputés par leur culture artistique et leur amour aux grandes signatures. Une classe politique, celle de l'opposition comme celle d'el Mouwalat, en l'absence de finesse artistique, de profondeur culturelle, ne parviendra jamais à être intègre et crédible ni dans la politique ni dans la religion. A. Z.