Résumé : Alors qu'ils discutaient de leurs pères respectifs dans la cuisine, Aïssa les rejoint. Il titubait, et Samir se lève pour l'aider à s'installer sur une chaise. Malika pince le bras de Mordjana. Son père risque de débiter des propos malveillants. Mordjana se lève pour le saluer. Gênée par son comportement, elle allait quitter les lieux, mais se heurte à sa belle-mère. Elle cligne des yeux, et fronce les sourcils en chuchotant : -Et alors... Que s'est-il passé dans la cuisine ? -Je... Heu... Samir m'a demandé de rejoindre ma chambre. Hasna pousse un soupir : -Je comprends, Aïssa a commencé à raconter des sottises. Ne prends pas ça du mauvais côté... Il est encore sous l'effet du vin. Enfin, tu dois le comprendre toi aussi, puisque ton père, tout comme lui, est un ivrogne invétéré. Comme Mordjana gardait toujours le silence, elle poursuit : -Et toi ? -Hein... ? -Te plais-tu chez nous ? -Heu... Oui... Oui... -Samir m'a semblé assez bien dans sa peau tout à l'heure... Avez-vous consommé votre mariage ? Mordjana baisse la tête et rougit dans l'obscurité de la cour faiblement éclairée par une lampe ancrée dans un mur. Hasna lui relève le menton brutalement : -Je te parle... Pourquoi ne réponds-tu pas ? -Je... Oui... Nous avons... Elle déglutit encore et les mots se bloquèrent dans sa gorge. Sa belle-mère lui prend le bras : -Je n'ai pas encore vu la preuve de ta virginité. Mordjana ouvrit de grands yeux ébahis. Elle avait pensé à tout, sauf à ça. Cette coutume de dévoiler des traces de sa nuit de noces avait disparu depuis des lustres, et de nos jours, personne ne se préoccupait de cette "preuve nuptiale". -Heu... Je... je ne savais pas que vous tenez encore à ça dans la famille... Hasna la dévisage d'un air courroucé : -Bien sûr qu'on tient à tout ce qui touche à notre honneur. Cela va de soi... -Mais Samir ne m'a rien dit... -Samir ? Mais ma chère, Samir ne connaît pas ces coutumes... C'est à toi de lui révéler ces détails... Ce sont les femmes qui se préoccupent de ces intimités. Mordjana sentit la moutarde lui monter au nez. Mais elle prend sur elle-même pour dominer ses émotions et répondre d'une voix calme : -En tous les cas, il est le premier concerné dans cette... cette affaire... Bien que notre mariage soit un peu "spécial", je ne pense pas qu'il aurait fermé les yeux sur des détails qui touchent à son honneur... Hasna reprenait difficilement son souffle. Mordjana la sentait tendue et prête à faire exploser sa colère. Un moment passe... L'atmosphère était électrique. La jeune femme se demandait si elle devait rejoindre sa chambre ou rester plantée là à attendre la réaction de sa belle-mère. Soudain, une voix s'élève dans les airs... Un son rauque et cassé... On entendait quelqu'un chanter un air ancien. Seulement, le rythme n'était pas juste, et les mots étaient incompréhensibles... -Et voilà encore mon ivrogne de mari qui reprend des siennes, lance Hasna d'un air las. Elle lève les yeux vers sa belle-fille, puis hausse les épaules et s'éloigne vers la cuisine. Samir qui venait d'en ressortir se heurte à sa mère. Cette dernière le repousse brutalement : -Qu'as-tu à courir ainsi ? Vous êtes tous devenus fous ce soir. Viens plutôt m'aider à raccompagner ton père dans sa chambre... Quand il est dans cet état, il n'y a rien d'autre à faire que de le remettre dans son lit jusqu'à ce qu'il cuve son vin... -Je ne pense pas qu'il veuille retourner au lit... Il est encore éméché certes, mais tu le connais bien... Lorsqu'il a émergé de sa première torpeur, il ne se rendort pas tout de suite. -Il va ameuter tout le voisinage en chantant ainsi à tue-tête... -Tout le quartier connaît les égarements de Aïssa... N'est-ce pas, mère... ? Tu vois bien qu'il a été jusqu'à brader mon avenir au poker. Sa mère le regarde d'un air désolé : -Je sais mon fils... Heu... Ne revenons pas là-dessus veux-tu ? Je viens de rencontrer ta... ta femme... Elle semblait pressée de rejoindre sa chambre. -C'est moi qui le lui avait demandé... Père commençait à débiter des sottises... (À suivre) Y. H.