Le Café littéraire de Béjaïa reçoit pour la troisième fois, depuis son lancement, le journaliste-reporter, caricaturiste et illustrateur, Chawki Amari. Il faut dire que le talentueux chroniqueur est devenu un écrivain prolixe. Et le public était au rendez-vous, samedi dernier au théâtre de la ville. Forcément, avoir l'occasion de remercier de vive voix celui qui exprime au quotidien le sentiment général des Algériens devant l'absurdité ambiante, on reporte à plus tard tous les rendez-vous. Chawki Amari en a profité, lui, pour parler de son dernier roman l'Âne mort (éditions Barzakh). Un livre par lequel l'auteur rend hommage à "L'Âne d'or" (ou Métamorphoses) d'Apulée de Madaure, "premier romancier du monde". Le géologue de formation, qu'il est, continue, à travers ses romans et sa conscience de l'absurde, à étudier les zones directement observables de la lithosphère, cette couche externe de la croûte terrestre constituée de plaques mobiles. Chawki l'avait fait dans un précédent roman dans le désert algérien. Il vient de le faire au nord, plus précisément dans les montagnes de Kabylie. Mais c'est surtout un livre qui parle à la fois de l'Algérie d'aujourd'hui, de la sensualité, de la métaphysique et de l'humain en général. "Par le roman un auteur donne du rêve aux gens", dira Amari, sans trop s'étaler sur le contenu de son livre, puisqu'il aura été plus question de politique, de religion et de la situation actuelle du pays que de littérature. Le public avait acquiescé sans broncher tellement il était plus intéressé par le chroniqueur et le commentateur politique que par le romancier. "Le livre, on a le temps de le découvrir", dira Mouloud, un lecteur assidu de Chawki Amari. Et à ce dernier d'enfoncer le clou : "J'ai toujours été opposant à ce régime et je le suis encore aujourd'hui, et j'écris sur les choses qui vont mal dans ce pays, et beaucoup de choses vont mal." Il évoquera aussi, au grand bonheur du public, son dernier périple, qui l'a mené en Amérique latine. Il relèvera que les pays de cette région du monde ont réussi leur transition démocratique contrairement à l'Algérie et aux pays arabes. Et l'une des clés du succès de cette transition sans heurts résiderait, selon l'hôte du Café littéraire, dans le fait que les religieux, y compris les représentants du clergé dans ces pays, avaient accompagné et participé aux luttes démocratiques et sociales. Ils n'avaient pas attendu la curée. "Chez nous, les religieux travaillent objectivement pour le pouvoir. Tant qu'on continuera à s'occuper de la tenue vestimentaire des femmes ou d'une certaine manière de pratiquer la religion sous l'influence d'idées wahhabites, nous ne sommes pas près de nous en sortir", a conclu Chawki Amari. M. O.