"Si le choc externe venait à perdurer, la résilience de la position extérieure de l'Algérie pourrait rapidement s'éroder, d'autant que le niveau très élevé des importations et non soutenable constitue un risque additionnel pour la balance des paiements extérieurs sur le moyen terme. La maîtrise du niveau de l'absorption devient impérieuse", a averti, jeudi à Alger, le gouverneur de la Banque d'Algérie, Mohamed Laksaci, lors de la présentation "des tendances monétaires et financières au cours du 4e trimestre 2014", en présence des P-dg de banque et des responsables des établissements financiers. Le gouverneur de la Banque d'Algérie a relevé que l'année 2014 s'est caractérisée par un déficit du compte courant de la balance des paiements dès le 1er trimestre, dont l'ampleur a doublé au cours du 2e trimestre, pour ensuite se stabiliser au 3e trimestre, avant de se creuser significativement au 4e trimestre. "En effet, le déficit du compte courant, enregistré au 4e trimestre (4,58 milliards de dollars), compte pour moitié du déficit de toute l'année (9,11 milliards de dollars), témoignant de l'effet de la baisse drastique du prix du pétrole au cours du dernier trimestre en situation de poursuite de la progression des importations", précise M. Laksaci. L'excédent appréciable du compte capital, soit 3,23 milliards de dollars contre un déficit de 0,87 milliard de dollars en 2013, en situation de moindre flux nets au titre des investissements directs étrangers (1,47 milliard de dollars pour la période sous revue), n'a que faiblement compensé le déficit du compte courant, de sorte que la balance des paiements extérieurs globale a dégagé un déficit de 5,88 milliards de dollars (0,13 milliard de dollars en 2013). En conséquence, "les réserves officielles de changes (or non compris) se sont contractées à 178,938 milliards de dollars à fin décembre 2014, contre 185,273 milliards de dollars à fin septembre 2014, après une stabilisation au 1er semestre (193,269 milliards de dollars à fin juin 2014, contre 194,012 milliards de dollars à fin décembre 2013)", a constaté M. Laksaci. Cependant, a-t-il indiqué, malgré cette baisse, le niveau des réserves officielles de changes (or non compris) reste adéquat, en situation de niveau historiquement bas de la dette extérieure (3,735 milliards de dollars à fin décembre 2014, contre 3,666 milliards de dollars à fin septembre 2014 et 3,396 milliards de dollars à fin décembre 2013). Cette position financière extérieure nette appréciable à fin 2014 devrait contribuer à atténuer l'effet du choc externe en 2015. En outre, le très faible endettement en devises des entreprises du secteur des hydrocarbures et des banques contribue à limiter l'impact des conséquences financières du choc externe. Pour ce qui est des finances publiques, le stock d'épargnes financières du Trésor sur ses comptes ouverts à la Banque d'Algérie est, aussi, en baisse à fin décembre 2014, comparativement à son niveau de fin juin 2014 et fin septembre 2014. L'encours global des comptes du Trésor (compte courant, Fonds de régulation des recettes) est évalué à 4 488,2 milliards de dinars à fin décembre 2014, contre 4 886,1 milliards de dinars à fin septembre 2014 et 5 235,6 milliards de dinars à fin juin 2014 (5 643,2 milliards de dinars à fin 2013). Contribution significative de l'expansion des crédits à l'économie à l'emballement des importations La Banque d'Algérie a relevé un fort rythme de croissance des crédits à l'économie (26,05%), dont l'encours a atteint 6 499,43 milliards de dinars à fin décembre 2014. Les crédits à moyen et long termes ont atteint 75,28% des crédits totaux à fin décembre 2014, dont 24,15% à moyen terme et 51,13% à long terme. Intervenant dans le débat, le délégué général de l'Abef a tenté d'atténuer le lien entre l'affectation des ressources par les banques et la hausse des importations, estimant que "la croissance des crédits est destinée essentiellement à l'investissement". Une analyse que ne partage pas le gouverneur de la Banque d'Algérie, relevant la contribution significative de l'expansion des crédits à l'économie à l'emballement des importations. Par ailleurs, Laksaci estime que "malgré l'accroissement des crédits à l'économie les trois dernières années, il reste que le ratio, crédit à l'économie par rapport au produit intérieur brut (PIB), est faible par rapport aux pays de la région". Du coup, a-t-il suggéré, "les banques devront diversifier leurs instruments de financement, tout en poursuivant de manière effective l'amélioration de l'analyse, de la mesure, du suivi et de la maîtrise des risques de crédit". Le gouverneur de la Banque d'Algérie a incité les banques "à développer les moyens d'action à terme par la promotion de produits financiers attractifs conjuguée à des rendements réels appréciables", avertissant que "le choc externe pourrait affecter leurs ressources à court terme". Ce qui pourrait contrarier la stratégie des pouvoirs publics de confier aux banques le financement des grands projets. M. Laksaci écarte cette hypothèse, rappelant que le système bancaire est en situation d'excès de liquidités depuis 2002. Par ailleurs, il a annoncé qu'un règlement édicté par le Conseil de la monnaie et du crédit réactive le dispositif de réescompte. Les banques auront le choix de continuer à emprunter sur le marché monétaire ou se refinancer auprès de la Banque d'Algérie. M. R.