Pourquoi un tel camouflet au moment où Tahmi réitère ouvertement, à quelques heures du vote décisif, la volonté politique de l'Algérie d'abriter l'événement le plus populaire du continent ? L'Algérie n'organisera pas la CAN-2017. Ainsi en a décidé le bureau exécutif de la CAF, hier au Caire, préférant jeter son dévolu sur le Gabon. Pourtant favorite en puissance, l'Algérie reçoit un coup de massue et subit un revers cuisant au double volet politique et sportif. Le ministre des Sports, Mohamed Tahmi, et le président de la FAF, Mohamed Raouraoua, présents au Caire, principaux artisans de cette candidature "solide", essuient un échec personnel et se voient doubler donc sur le fil par le jeu de coulisses gabonais, beaucoup plus efficace. Pourquoi donc un tel camouflet au moment où Tahmi réitère ouvertement, à quelques heures du vote décisif, la volonté politique de l'Algérie d'abriter l'événement le plus populaire du continent ? Visiblement, c'est sur la scène politique — diplomatique pour être précis — que le bât blesse. Surnommé le Qatar de l'Afrique, le Gabon, avec à sa tête un président tonitruant, en l'occurrence Ali Bongo Ondimba, n'a pas hésité à sortir le chéquier pour se donner les moyens de sa politique. Un lobbying à coups de millions d'euros que Tahmi, dans une première réaction hier à partir du Caire, a préféré présenter, protocole oblige, comme "les ravages des jeux de coulisses". Tout au long de la campagne qui a précédé le scrutin, l'exubérant Ali Bongo Ondimba s'est investi pleinement pour porter aux nues la candidature de son pays. Pendant ce temps, le président algérien Abdelaziz Bouteflika, qui assurait au début de son règne que l'Algérie était capable d'organiser deux Coupes du monde successives, observait un silence curieux sur le sujet. Il n'a pratiquement jamais abordé la question ou réservé quelques mots pour apporter son soutien au dossier algérien. Même le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, ne s'est pas trop investi, laissant le soin à son ministre des Sports de se débrouiller comme il peut. D'ailleurs, à l'issue de l'audience accordée le mois dernier à Issa Hayatou, Sellal s'est abstenu de toute déclaration, peut-être pour ne pas donner de faux espoirs aux Algériens. Ce n'est qu'après avoir été informé de "l'échappée gabonaise" dans les sondages "cafiens" que Sellal a chargé son ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, de rattraper le coup. C'était déjà trop tard. Les membres de l'exécutif de la CAF avaient déjà, pour leur majorité, fait leur choix. Sinon, comment expliquer que des pays traditionnellement pro-algériens, à l'image de la Tunisie, du Mali et du Tchad, pour ne citer que ceux-là, aient "trahi" l'Algérie le jour J ? Par ailleurs, l'échec algérien s'explique aussi par l'animosité prononcée du président de la CAF, Issa Hayatou, qui n'a jamais caché son aversion envers les pays du Maghreb. Sa rancune a la peau dure, même dans le corps d'un vieil homme déclinant. Après avoir favorisé son Cameroun natal pour l'édition 2019, pistonné la Côte d'Ivoire pour 2021 et la Guinée en 2023, réussissant la prouesse personnelle de "fixer" la CAN pendant six ans d'affilée en Afrique de l'Ouest, ce qui correspond déjà à un fait inédit, le président inamovible de la CAF fait beaucoup mieux. Le patriarche au regard toujours hagard spolie l'Afrique du Nord de son "droit" d'organiser la CAN-2017 et offre un autre présent à l'Afrique de l'Ouest (Gabon). Du coup, Hayatou (68 ans) fait de la CAN une chasse gardée au mépris de toutes les règles démocratiques. Le fait, du reste, d'avoir fait voter à l'unanimité l'amendement faisant sauter le verrou de la limite d'âge à la présidence de l'instance africaine, ce qui devrait lui offrir toute latitude de briguer un nouveau mandat en 2017, renseigne suffisamment sur ses velléités tyranniques. Rabroué et humilié par le TAS dans l'affaire des sanctions contre la JSK et le Maroc, qu'il a lui-même ordonnées, Hayatou n'a pas pour autant tempéré ses ardeurs hautaines. Il est resté égal à lui-même, revanchard et machiavélique ! S. L.