Le Conseil français du culte musulman et l'Observatoire contre l'islamophobie ont rendu public, jeudi, un communiqué dans lequel ils relèvent une explosion exponentielle des actes antimusulmans et la cyberhaine. "Jamais depuis la mise en place de l'Observatoire national de lutte contre l'islamophobie, en 2011, dont le terme a été employé par le président de la République et qui vient d'être reconnu par la CNCDH (Commission nationale consultative des droits de l'Homme), et ce, malgré l'opposition d'hommes politiques de droite, comme de gauche, les actes antimusulmans n'ont connu une telle implosion par des actions, menaces ou sur les réseaux sociaux", dénoncent ces institutions. Suivent ensuite des chiffres pour les mois de janvier, février et mars pour les années 2014 et 2015. La comparaison est tout simplement effarante. Ainsi en janvier 2014, 14 actes ont été enregistrés, pour 178 en 2015, soit une augmentation de 1 171%. En février 2014, 10 actes seulement contre 18 en 2015, soit un bond de 80%. En mars 2014, sont enregistrés 13 actes contre 26 pour la même période en 2015, soit une augmentation de 100%. Le nombre d'actes commis uniquement en janvier 2015, à savoir 178, dépasse largement les actes commis durant toute l'année 2014, à savoir 133. En définitive, pour le 1er trimestre 2015, il y a eu 222 actes antimusulmans (56 actions et 166 menaces) contre un total de 37 actes en 2014 (12 actions + 25 menaces), soit 500% d'augmentation. "Si cette implosion des actes antimusulmans s'explique pour certains en raison du mois de janvier 2015, suite aux événements dramatiques qu'a connus notre pays après les crimes abjects, horrifiants et terrifiants envers les journalistes de Charlie Hebdo, cela ne peut, en aucun cas, justifier ce sommet de haine ou de vengeance à l'égard des Français de confession musulmane qui ne sont ni responsables ni coupables des actes terroristes qui ont endeuillé le pays par des ‘islamistes' criminels qui se revendiquent de l'islam pour commettre de tels crimes", estiment le CFCM et l'Observatoire contre l'islamophobie. Décrivant ces actes, ces deux institutions parlent "d'agressions violentes à l'égard d'hommes et de femmes dont certaines enceintes et cela continue encore. Une femme a même perdu son bébé suite aux coups de poing et de pied reçus au ventre", lit-on encore dans le communiqué qui note, en revanche, que "c'est la première fois qu'il a été enregistré des jets de grenade ou des tirs d'arme à feu". Pour le reste, ajoutent le CFCM et l'Observatoire : "Il s'agit des actions contre des lieux de culte ; dégradations de commerces appartenant à des Français de confession musulmane ou inscriptions de tags nazis par des apprentis nazillons qui passent leur temps à fleurir les murs de nos mosquées." L'islamophobie se traduit également par des discriminations depuis l'année 2014 et cela s'est amplifié en ce 1er trimestre 2015 contre des Français de confession musulmane, de femmes et d'hommes victimes de discrimination d'origine institutionnelle (dans l'enseignement, la police, les collectivités locales, la SNCF, etc.). "C'est purement et simplement du racisme et le rejet d'hommes et de femmes qui aspirent à être respectés", s'indignent l'Observatoire contre l'islamophobie et le CFCM qui posent deux questions : "Est-ce que le vivre-ensemble existe réellement en France ?" ; "Est-ce que la devise de la République (liberté, égalité, fraternité) a un sens ?" Pis encore, écrit Abdellah Zekri, qui signe le communiqué : "Tout cela se passe sans aucune réaction de la part de la classe politique qui, au lieu de dénoncer une telle dérive, essaie de lui trouver des raisons." Et ce dernier de revenir sur les élections régionales en France où, pour gagner des voix, "certains hommes politiques de droite comme de gauche n'ont pas hésité à surfer sur des thèses du Front national pour proposer encore une loi sur le voile ; le foulard à l'université ; la formation des imams ; les repas de substitution ; la déchéance de la nationalité française ; la laïcité ; l'intégration, etc.". Abdellah Zekri conclut en avertissant qu'"un intégrisme nourrit un autre intégrisme et il ne faut pas s'étonner que des jeunes se sentant exclus, marginalisés, accusés de tous les maux, se radicalisent et vont se faire tuer gratuitement, considérant qu'ils n'ont plus d'avenir dans ce pays". R. N.