Résumé : Maroua arrive à temps pour constater les dégâts. Les larmes de son aînée lui prouvèrent encore une fois que sa mère n'acceptait pas le bonheur de sa fille. Mordjana reconnaît qu'elle s'était emportée et tente de calmer les esprits. Elle demande à sa sœur des nouvelles de sa famille... Le temps passe tellement vite... Deux années se sont déjà écoulées depuis son mariage. Maroua vide le panier, met les victuailles sur la table et se retrousse les manches : -Il est temps de penser à préparer le dîner...Viens donc m'aider Safa. -Je vais t'aider moi-même, dit Mordjana. -Il n'en est pas question. Tu vas salir ton joli tailleur, et puis tu dois être épuisée. Viens donc t'asseoir à côté de moi... Nous avons un tas de choses à nous raconter. Mordjana lance un regard à la dérobée à sa mère. Cette dernière sirotait son thé et suivait distraitement la conversation. -Je vais d'abord me changer... Ensuite, je viendrais vous aider à éplucher les légumes... Samir adore nos plats traditionnels... Maroua sourit : -Tu l'as forcément initié à nos menus. -Bien entendu... Je voulais lui démontrer que je n'étais pas une piètre cuisinière. Elle se tut, puis reprend d'une petite voix : -Il a tant fait pour moi... Je lui dois beaucoup... Grâce à lui, je suis une femme accomplie aujourd'hui. J'ai suivi une formation, j'ai un boulot, et je gagne bien ma vie. Elle avait débité sa phrase sur un ton détaché, mais Maroua avait tout de suite ressenti la tristesse qui perçait dans sa voix. Sa sœur souffrait. Elle sursaute. Avait-elle des ennuis de santé ? Elle lui jette un regard interrogateur, mais Mordjana détourne la tête et s'empresse de quitter la cuisine. Samir se réveille avec une migraine et porte la main à son crâne. La chambre était plongée dans le noir, et il eut du mal à reprendre ses esprits. Puis tout lui revint. Le voyage, la chaleur et ses difficultés à s'adapter au climat torride du Sud. Il se rappelle Mordjana. Ces derniers temps, elle lui avait semblé mélancolique et quelque peu préoccupée... Mais comme d'habitude, elle ne se confiait pas à lui. Il met ses états d'âme sur le stress. Pour ce petit voyage hâtif dans sa famille, Mordjana s'était surpassée. Elle avait préparé des gâteaux, acheté des confiseries et parcouru les quartiers de la ville dans tous les sens afin de dénicher ces petites choses qui feraient plaisir à sa mère, ses frères et sœurs et à ses grands-parents. Elle était tellement généreuse Mordjana... Elle pensait tellement aux autres qu'elle s'oubliait parfois elle-même. Samir s'étire et s'assoit sur le canapé. Il avait grand besoin d'un comprimé d'aspirine. Des voix lui parvenaient. Des femmes parlaient et riaient. Il regarde sa montre et constate qu'il était déjà 18h. Il avait dormi plus de quatre heures mais n'avait pas encore récupéré. La chaleur s'était atténuée, et par la fenêtre entrouverte il sentit même une petite fraîcheur pénétrer dans la chambre. Quelqu'un frappe à la porte de la chambre avant d'entrer et de donner la lumière. Sa femme se tenait devant lui : -Tu es réveillé ? -Tu le vois bien... -Je vais te servir un thé... -Je préfère un comprimé d'aspirine d'abord, dit-il en tenant son crâne. -Le voyage t'a fatigué Samir... -Plutôt la chaleur... -Je sais... Les soirées sont plus douces... Tu va apprécier... Il soupire : -Si tu le dis... Moi je sens que je pourrais dormir encore deux jours. Elle rit : -C'est le temps qu'on doit passer dans ma famille... Tu n'auras donc pas le loisir de visiter la ville ni d'apprécier notre générosité. Il hausse les épaules : -Je ne sais pas comment vous faites pour supporter cette chaleur... J'ai cru étouffer sur la route. -J'ai fait la route en sens inverse pour de longs kilomètres en voiture le jour de notre mariage. Nous avons avalé des tonnes de poussière et supporté l'enfer... J'étais emmitouflée dans un burnous, le visage caché sous un voile. Maroua tentait de me rafraîchir avec un éventail... Autant jeter une goutte d'eau dans un brasier... Ta maman et Malika voyageaient dans un véhicule climatisé. Ce n'était pas le cas pour nous. Et puis, il y avait cette angoisse qui me nouait l'estomac au point où j'en suis tombée malade. Il hoche la tête : -Je le savais... Malika m'avait tout raconté. Je suis désolé... Tu as dû souffrir le martyre. Elle sourit : -Je ne regrette pas cependant d'avoir fait ce trajet pour te rejoindre... Aujourd'hui je suis heureuse d'être ta femme... Elle remarque sa grimace, puis ses mains qui tenaient toujours son crâne et s'écrie : -Heu... Excuse-moi, je devrais aller te chercher un comprimé d'aspirine, et je suis là à papoter comme une pie. Elle sortit en courant et revint avec un verre d'eau et une boîte d'aspirine. -Tiens, avale tout d'abord un comprimé, si ta migraine persiste, tu en prendras un deuxième. (À suivre) Y. H.