Le président du Mali Ibrahim Boubacar Keïta demeure optimiste, en dépit de la recrudescence des violences armées dans le Nord. La situation sur le terrain a pourtant de quoi inquiéter. À moins de deux semaines de la signature de l'Accord de paix et de réconciliation à Bamako, les événements ont pris une dangereuse tournure au Mali. Les affrontements opposant les Forces armées maliennes (Fama) à la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA), depuis une dizaine de jours, soulèvent moult inquiétudes au sein de la communauté internationale. Le gouvernement malien a affiché une ferme volonté de signer le document d'Alger, avec ou sans la CMA. Mais la date du 15 mai sera-t-elle maintenue, comme l'a annoncé l'Algérie, sous l'égide de l'ONU ? Au vu de l'évolution de la situation sécuritaire dans le Nord-Mali, le risque d'un report de cette signature n'est pas à écarter. À l'enthousiasme du président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, et de son staff gouvernemental, la réalité du terrain oppose un sentiment de peur grandissante qui augmente le pessimisme des Maliens quant à une fin heureuse de ce conflit qui dure depuis plus de cinq décennies. La CMA a mobilisé en effet ses troupes et repris le contrôle de plusieurs localités, en s'attaquant aux positions de l'armée malienne, comme cela est le cas à Tabankourt, Léré, Intadouft ou encore Intadeyni. Officiellement, la CMA affirme avoir agi en légitime défense, suite à la récente "offensive" du Groupe d'autodéfense des Touareg de l'Imghad et alliés (Gatia) qui s'est soldée par sa reprise de Ménaka et le départ du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) de cette ville, située à 200 kilomètres à l'est de Gao. De son côté, la Fama déclare aussi avoir répondu à ce qu'elle a qualifié d'agression de la part du MNLA et de ses alliés, le Haut-Conseil pour l'unité de l'Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA). Malgré les appels à la retenue et les menaces de sanctions émises par l'ONU, à l'encontre des cadres de la CMA, rien n'augure d'un arrêt immédiat des hostilités. Interrogé par internet, le chargé de communication de la CMA, Mohamed el-Maouloud Ramadane a déclaré que "la situation a dégénéré" dans le Nord-Mali. Notre interlocuteur a indiqué aussi que les mouvements de l'Azawad n'ont toujours pas décidé d'apposer ou non leur signature sur le document proposé par la médiation internationale pour garantir une paix durable au Mali. Mohamed el-Maouloud Ramadane a ajouté que l'attention de la Coordination des mouvements de l'Azawad est happée par ce qui se passe dans le centre et le nord du Mali. "Nos yeux sont braqués sur le terrain" où les violences ont fait plusieurs morts et des dizaines de blessés, sans oublier le nombre important d'éléments armés qui ont été fait prisonniers dans les deux camps. Aucun bilan officiel n'a été publié, aussi bien de la part des autorités maliennes que du côté des mouvements du Nord. Car, les chiffres du nombre de morts, de blessés et de prisonniers servent aussi de moyen de désinformation et de propagande pour les deux parties en conflit. Samedi soir, des dizaines de Maliens ont marché "pour la paix" à Bamako et à Gao, et en soutien à la reprise par Gatia de Ménaka, une ville du centre-est du Mali qui était sous le contrôle du MNLA. Au final, l'optimisme de la médiation internationale et le gouvernement malien cèdent progressivement la place à un sentiment de désarroi face à l'arrêt incertain des violences armées dans le Nord-Mali. L.M.