Le président du Mali, Ibrahim Boubacar Keïta, s'est déplacé, en visite surprise, à Gao où trois civils sont morts, sous les balles des soldats de l'ONU, lors d'une manifestation contre la Mission multidimensionnelle d'intégration et de stabilisation du Mali (Minusma). Il a affirmé que ce «crime ne restera pas impuni», soulignant toutefois que l'ONU n'est «pas l'ennemie» du Mali, ont rapporté les médias locaux et les agences de presse. «Des enquêtes seront menées pour établir les responsabilités. Ce crime ne restera pas impuni», a déclaré M. Keïta qui s'était rendu à Gao en compagnie du numéro deux de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma), Arnauld Akodjènou. Ce dernier avait affirmé la semaine dernière que ses soldats n'ont pas tiré sur les manifestants qui auraient tenté d'accéder au siège de la Minusma, en jetant par ailleurs des cocktails Molotov, selon plusieurs sources. Tout en affichant son soutien et sa compassion face aux douloureux évènements qui ont coûté la vie à trois manifestants, le Président malien a ajouté : «Je voudrais également vous dire que la Minusma n'est pas notre ennemie», a repris l'APS. «Il faut éviter d'être influencé par d'autres individus qui n'aiment pas notre bonheur», a-t-il encore lancé, sans préciser ce qu'il visait. Pour rappel, les manifestants ont marché à Gao contre la conclusion d'un accord entre la Minusma et les groupes rebelles du Nord, pour la création d'une zone temporaire de sécurité. Mais la manifestation a dégénéré en affrontements devant le siège de la mission onusienne, selon différentes sources. La sortie du Président malien intervient dans un contexte marqué par une montée de la violence armée dans le nord du pays. Ces violences opposent les groupes politico-armés de la Coordination des Mouvements de l'Azawad (CMA) aux mouvements armés pro-maliens, dominés par le Groupe d'autodéfense des touareg de l'Imghad et alliés (Gatia). Gatia mène depuis fin novembre une véritable offensive contre les membres de la CMA, qui rassemble principalement le Mouvement national de libération de l'Azawad (Mnla), le Haut Conseil pour l'unité de l'Azawad (Hcua) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA). Cette offensive constitue une violation de l'accord du cessez-le-feu conclu le 23 mai 2014 et contredit totalement le discours soi-disant pacifique des leaders de Gatia. Les fondateurs de Gatia avaient déclaré, en effet, à la naissance de leur mouvement en août dernier, que ce groupe armé cherche seulement à défendre les intérêts d'une partie des Maliens du Nord qui s'opposent à tout projet de partition du Mali. Mais la réalité du terrain a montré le contraire. Attaqués par Gatia dans leurs campements, le Mnla et ses partenaires ont été obligés de riposter. Les choses seraient restées là si la Minusma n'avait pas mené, à son tour, des raids aériens contre le Mnla, accusé à tort, selon lui, de s'être attaqué à un convoi de la mission onusienne dans le Nord. Pis, les attentats kamikazes commis par Gatia sur les camps du Mnla et de ses alliés à Tabankort et la poursuite des affrontements dans cette région réduisent toute chance d'une reprise immédiate du dialogue inclusif inter-malien, sous la médiation algérienne. Accusé par le Mnla d'aider Gatia, le Président malien ne semble pas en mesure d'apporter une réponse à ces allégations. L. M.