La porte-parole du PT ainsi que des parlementaires du RND et du FLN vont proposer des amendements autres que les modifications “pâles” retenues. Des représentantes du Sénat les soutiennent dans leur démarche. Nostalgique, Louisa Hanoune, porte-parole du Parti des travailleurs et députée, s'est rappelée hier les temps glorieux où des jeunes femmes avaient marché dans la rue pour contester l'adoption du code de la famille par l'Assemblée du parti unique, encadrées par de valeureuses moudjahidate à l'instar de Zohra Drif-Bitat. C'était en 1984. “À l'époque, nous manquions de discernement. Ce vote constituait la première expression de l'intégrisme islamiste”, a observé Mme Bitat avec regret. Les deux femmes se sont exprimées à l'occasion de la journée d'étude organisée par le ministère délégué à la Famille au siège de l'Assemblée populaire nationale. Des parlementaires, représentant les différentes formations politiques siégeant au Sénat et à l'APN, des membres du mouvement associatif et des juristes ont pris part à ce débat. Le thème de la manifestation étant la célébration par l'Algérie du 25e anniversaire de la Convention internationale pour la suppression des différentes formes de discrimination contre les femmes (Cedaw), les intervenantes en ont profité pour ressasser les ratés de notre pays dans ce domaine. Les réserves émises sur les articles fondamentaux de ce traité et la régression consacrée plus tard, dans l'adoption du code de la famille, ont donné lieu à des critiques acérées. De l'avis de l'assemblée majoritairement féminine, autant le texte de 1984 que la version algérienne de la convention onusienne sont anticonstitutionnels. Car si la loi fondamentale du pays institue clairement l'égalité parfaite entre les hommes et les femmes, les fameuses réserves entérinées par le code de la famille, notamment en matière d'héritage, de divorce… la remettent en cause. “Cette contradiction doit être supprimée”, a préconisé Louisa Hanoune. Fidèle à ses revendications, la présidente du PT demande — encore et toujours — l'abrogation du code de la famille. Selon elle, les préceptes de la charia sur lesquels se sont basés les députés de l'ex-parti unique pour justifier leur vote tiennent de l'instrumentalisation de la religion et relèvent de l'hypocrisie. “Il y a des partis politiques qui se rappellent uniquement de la charia quand il s'agit des femmes”, s'indigne-t-elle. La gent masculine siégeant actuellement à l'APN n'a pas plus de gloire à ses yeux. “Quelqu'un a assimilé les femmes à des vaches dans cette Assemblée”, a rapporté Mme Hanoune outrée. D'ores et déjà, elle sait que nombre d'entre eux, notamment ceux issus des partis islamistes mais aussi des conservateurs du RND et du FLN, contesteront la version revue et corrigée du code de la famille. Aussi dans ce genre de situation, la solidarité féminine est-elle l'unique moyen pour faire avancer la cause ? Outre les amendements proposés par la commission Boutern — du nom de son président, magistrat à la Cour suprême — concernant la levée de la tutelle matrimoniale, la limitation de la répudiation, le partage de la tutelle parentale… la députée du PT et ses camarades du FLN et du RND comptent proposer d'autres modifications plus audacieuses. La promotion du droit de la femme à l'héritage en fait partie. C'est en tout cas l'un des enjeux de la bataille engagée par les femmes députées. Chérifa Benameur du FLN défend bec et ongles ce droit. S'il elle n'a pas réussi à influencer suffisamment les membres de la commission Boutern à laquelle elle a pris part, elle compte bien y remédier à l'hémicycle. Fatma-Zohra Flici, députée RND, entend également mettre les pieds dans le plat. À ses yeux, les changements de la commission, entérinés par le Conseil de gouvernement, sont des "miettes”. “Nous devons peser de tout notre poids pour obtenir plus”, s'engage-t-elle. Les députées ont un soutien non négligeable en la personne de Zohra Drif-Bitat. Connue pour être une proche du président de la République, cette sénatrice adhère totalement aux revendications de ses collègues de l'Assemblée. “Il faut se mobiliser pour régler définitivement le problème du code de la famille”, recommande-t-elle avec force. S. L.