Quelques jours seulement après la prise de l'aéroport de Syrte, l'organisation terroriste, EI (Etat islamique) fait encore parler d'elle en Libye. Hier, elle a revendiqué un attentat-suicide contre les milices Fadjr Libya (Aube de Libye), une coalition de milices, dont certaines islamistes, ayant pris le pouvoir l'été dernier à Tripoli en installant un nouveau gouvernement et un nouveau Parlement et poussant les autorités reconnues par la communauté internationale à s'exiler dans l'est du pays. La branche de l'Etat islamique a frappé cette fois, près de la ville de Misrata, où un kamikaze, de nationalité tunisienne, "à bord d'une voiture piégée s'est fait sauter près d'un point de contrôle à une entrée de Dafiniyah", selon de nombreuses agences de presse. Cet attentat-suicide a tué cinq miliciens de Fajr Libya, dans cette localité située entre Zliten (150 km à l'est de Tripoli) et Misrata (200 km à l'est de la capitale). Daech, qui a revendiqué l'attaque sur un compte twitter, a indiqué que le kamikaze a été identifié comme étant "Abou Wahib al-Tounsi". Apparu dans le paysage libyen l'an dernier, à la faveur du chaos qui règne dans ce pays depuis la chute de Mouammar Kadhafi en 2011, Daech contrôle désormais des zones dans la région de Syrte (450 km à l'est de Tripoli), notamment son aéroport. Il a décidé de mener une guerre contre les forces de Fajr Libya et dont l'objectif est de "purifier la terre de leur crasse", selon leur terminologie, appelant ces miliciens "à se repentir de leur apostasie et à retourner à leur religion". Cette poussée de la menace de la branche de Daech en Libye a contraint le gouvernement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale, à renouveler son appel à l'aide militaire pour y faire face. Le cabinet, dirigé par le Premier ministre El-Théni, a notamment mis l'accent sur les risques que représente le plan de Daech de s'emparer des champs pétroliers près de Syrte, après avoir pris l'aéroport de cette ville côtière du centre du pays. Dans un communiqué sur sa page officielle "Facebook", le gouvernement libyen presse la communauté internationale de "livrer des armes à ses forces pour combattre le plan de l'EI, à savoir s'emparer des champs de pétrole en vue de financer ses opérations". Il s'engage également "à tout faire pour reprendre la ville de Syrte et son aéroport des mains des terroristes". Ce SOS intervient après une sollicitation de l'ONU, à la fin du mois de février dernier, pour une levée de l'embargo sur les armes pour permettre au gouvernement de mieux lutter contre Daech. Une demande restée sans écho puisque de nombreux membres du Conseil de sécurité, notamment l'Espagne, s'y sont opposés au motif que les armes livrées risquaient de tomber entre de mauvaises mains et d'alimenter le trafic d'armes. Face à la situation en Libye, la communauté internationale privilégie aujourd'hui une solution politique. L'ONU tente une médiation entre le Parlement reconnu sur la scène internationale et le Congrès national général (CNG, Tripoli), dont le mandat a expiré, l'objectif étant de parvenir à une solution politique à la crise par le biais de la formation d'un gouvernement d'union nationale et l'arrêt des violences dans ce pays, en proie à une guerre civile dévastatrice depuis quatre ans. Après les réunions d'Alger et de Rabat, censées jeter les jalons pour un processus de sortie de crise, Le Caire s'est mis de la partie ces derniers jours en accueillant une réunion des chefs de tribus libyennes, à laquelle beaucoup n'ont pas participé. C'est dire que les ressorts de la crise sont complexes et compliqués. M.T.