Quelques mois après les attentats contre Charlie Hebdo, la France se dirige vers l'adoption d'une nouvelle stratégie destinée à contrer la menace jihadiste. La France, qui passe pour être le premier fournisseur européen de jihadistes depuis l'affaire Merah jusqu'aux récents attentats contre Charlie Hebdo, s'emploie à trouver une réponse appropriée à un phénomène qui, visiblement, a pris racine dans la société française, le jihadisme. En effet, selon un dernier bilan, en date du 26 mai, cité hier par le journal de référence Le Monde, 457 Français — dont 137 femmes et 80 mineurs — sont actuellement en Syrie, 320 personnes seraient en transit vers les zones de combat, 105 individus y ont déjà perdu la vie dont 8 dans des opérations suicide, et 2 y seraient détenus. 213 personnes seraient déjà rentrées en France tandis que 521 auraient des projets de départ. En agrégeant ces données, "la France apparaît actuellement comme le principal pays européen de départ (avec 884 personnes au total), elle est suivie du Royaume-Uni (700 départs), de l'Allemagne (600) et de la Belgique (250 environ)", souligne un rapport de la commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus jihadistes, créée en décembre 2014. Dans ce rapport dont de larges extraits ont été publiés par Le Monde, la commission appelle le gouvernement à renforcer les moyens administratifs et judiciaires destinés à l'endiguer, tout en insistant sur la nécessité "d'apporter une réponse autre que sécuritaire à un phénomène qui a pris profondément racine dans notre corps social". Outre le renforcement de la lutte contre la radicalisation dans les prisons, point de départ pour certains jihadistes, à travers notamment l'amélioration de la "grille d'évaluation du degré de radicalisation", "la révision des critères de regroupement des détenus", la commission plaide pour la mise en place d'un véritable service de renseignement pénitentiaire. Autres suggestions : doublement des effectifs de policiers enquêteurs formés à la lutte antiterroriste ; étendre l'accès aux fichiers tels que le système d'immatriculation des véhicules, le système de gestion des passeports ou des cartes nationales d'identité, actuellement dévolus à la DGSI, au Service central du renseignement territorial (SCRT), à la DRPP et à la gendarmerie, mais aussi mieux contrôler les entrées et sorties aux frontières à travers une batterie de mesures. Enfin, la commission, s'appuyant sur le modèle danois, préconise la prise en charge des individus moins dangereux, à leur retour des zones de combat, et l'élaboration d'un véritable contre-discours à la propagande jihadiste, en développant la recherche universitaire et en donnant une plus grande publicité aux témoignages de "repentis". K K.