Le sévère rappel à l'ordre de Ramtane Lamamra, lancé jeudi, à Bruxelles même, en direction de l'Union européenne (UE), ne semble pas uniquement justifié par la récente résolution condamnant "le harcèlement de militants des droits de l'Homme et des travailleurs en Algérie". Une résolution adoptée par le Parlement européen, lors de sa session plénière du 30 avril 2015. Ce que le ministre des Affaires étrangères algérien a considéré comme "ingérence" trouve aussi son explication dans les pressions exercées entre-temps par des ONG des droits de l'Homme. À une semaine de la tenue de la 9e session du conseil d'association Union européenne-Algérie, et à l'issue de laquelle M. Lamamra a réagi, cinq ONG, et pas des moindres, ont demandé à l'UE de saisir cette opportunité pour aborder certaines questions. La Fédération internationale des Ligues des droits de l'Homme (FIDH), le Réseau euroméditerranéen des droits de l'Homme (REMDH), Amnesty International, l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et Solidar ont interpellé Federica Mogherini et ont insisté pour, entre autres, "soulever au plus haut niveau l'appel à la libération de dix militants du droit au travail, détenus arbitrairement en Algérie". Mais il se trouve que ces récents événements ont été précédés par plusieurs rapports négatifs de l'Union européenne sur la situation des droits de l'Homme en Algérie. Des rapports qui s'appuient sur l'article 2 de l'accord euroméditerranéen établissant une association entre l'Algérie et la communauté européenne et ses Etats membres. Ledit article stipule : "Le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'Homme, tels qu'énoncés dans la déclaration universelle des droits de l'Homme, inspire les politiques internes et internationales des parties et constitue un élément essentiel du présent accord." Depuis la Conférence de Barcelone en 1995, et à l'issue de laquelle un accord global a été défini entre les deux rives de la Méditerranée, l'Union européenne n'a, en vérité, jamais cessé d'épingler l'Algérie sur la question des droits de l'Homme. Pour ne citer que les observations émises le 27 mars 2014, soit à la veille de l'élection présidentielle en Algérie, la Commission européenne avait fortement accablé l'Algérie : "La situation générale en ce qui concerne les droits de l'Homme n'a pas changé de manière significative en 2013. On a l'impression d'une absence constante d'indépendance du pouvoir judiciaire et la situation semble s'être détériorée en ce qui concerne la liberté d'association et de réunion (notamment le maintien des obstacles auxquels doivent faire face les syndicats indépendants) et la liberté d'expression (notamment pour les blogueurs). Les femmes sont bien représentées (30%) au Parlement depuis 2012, mais des dispositions controversées du code de la famille n'ont pas été modifiées." M.M.