Le président tunisien, Béji Caïd Essebsi, avait averti qu'un autre attentat, de l'ampleur de celui commis à Sousse le 26 juin dernier, provoquerait l'effondrement de l'Etat. La Tunisie est en état d'urgence depuis le 4 juillet et elle le restera jusqu'au 2 août prochain, suite à la décision du président Béji Caïd Essebsi qui a agi une semaine après l'attaque terroriste de Sousse du 26 juin. Face à la menace terroriste, les autorités tunisiennes se sont vues contraintes de prendre une telle mesure qui, dans l'article 4, "donne pouvoir au gouverneur dans les zones prévues à l'article 2 et autant que la sécurité et l'ordre publics l'exigent : d'interdire la circulation des personnes ou des véhicules, d'interdire toute grève ou lock-out même décidés avant la déclaration de l'état d'urgence, de réglementer les séjours des personnes, d'interdire le séjour à toute personne cherchant à entraver de quelque manière que ce soit l'action des pouvoirs publics, de procéder à la réquisition des personnes et des biens indispensables au bon fonctionnement des services publics et des activités ayant un intérêt vital pour la nation", lit-on dans le texte des dispositions régissant l'état d'urgence, élaboré du temps du défunt président Habib Bourguiba le 26 janvier 1978. "Dans les zones soumises à l'application de l'état d'urgence, les autorités (ministère de l'Intérieur et les gouverneurs) peuvent ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit et prendre toutes les mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature, ainsi que celui des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales", ajoute le texte dans l'article 8. Autrement dit, les autorités tunisiennes peuvent procéder à la fermeture des mosquées qui échappaient, jusqu'ici, au contrôle de l'Etat, sans la moindre difficulté. D'ailleurs, le Premier ministre, Habib Essid, a annoncé, au lendemain de l'attentat de Sousse, que 80 mosquées et lieux de prières seront fermés dans les prochains jours. Toutefois, face aux craintes émises par les médias et les défenseurs des droits de l'Homme en Tunisie, le président tunisien a assuré, samedi, dans son discours, qu'il garantira la liberté d'expression et le droit à l'information, tout en appelant les journalistes à faire preuve de "sens de la responsabilité" face au danger islamiste et terroriste qui menace l'avenir du pays. La décision de Béji Caïd Essebsi a obtenu le soutien total et "inconditionnel" d'Ennahdha, le parti islamiste de Rached Ghannouchi, proche de la mouvance des Frères musulmans égyptiens. "À la lumière des menaces et des attaques terroristes qui ont grandement endommagé la sécurité du pays, mais aussi sa stabilité et son économie, ce qui nécessite une confrontation globale et de longue haleine (...) Ennahdha affirme son soutien à la décision du chef de l'Etat de décréter l'état d'urgence", lit-on dans le communiqué publié par le parti de Ghannouchi sur son site et largement repris par les médias tunisiens qui ont tous appelé à un soutien actif de la population tunisienne contre le terrorisme. Mais les autorités tunisiennes sont totalement conscientes que le défi à relever dépasse les moyens dont dispose le pays, en proie à une grave crise sociale et économique. Ce que ne manque pas de rappeler le chef de l'Etat dans son discours annonçant, samedi, l'instauration de l'état d'urgence d'une durée de trente jours à travers tout le territoire national. "Notre gouvernement a hérité d'un passif qu'il doit gérer et de plus de 600 000 chômeurs", avait-il reconnu, mais en affirmant que l'urgence aujourd'hui est de lutter, comme un seul homme, contre ce fléau qui menace aussi bien la Tunisie que les autres pays de la région. L. M.