Le sujet de la pièce est peut-être le plus commun aux êtres humains de toute la planète, une demande en mariage, mais en filigrane c'est le problème de communication, l'entêtement et la fixation sur des futilités, quitte à tout perdre, qui ressortent. Les habitués du théâtre régional de Batna et plus particulièrement les juillettistes ont eu une agréable surprise lors de la 17e soirée du mois de Ramadhan, puisqu'ils ont assisté à la représentation de la pièce El-Khotba (la demande en mariage) de la coopérative Ettadj de Bordj Bou-Arréridj. La célèbre pièce Une demande en mariage d'Anton Tchekhov a été sûrement adaptée, traduite, réécrite des milliers de fois, sinon des millions selon le metteur en scène Halim Zeddam du théâtre Ettadj, qui n'en est pas à son premier travail théâtral. Il s'est lancé cependant un challenge, celui d'apporter une touche algérienne, quand bien même le sujet serait universel dans le fond et dans la forme. Le rideau laissé ouvert sur un décor d'époque (XIXe siècle) et tour à tour les trois comédiens (un voisin, un père et sa fille) font leur apparition. Le sujet de la pièce est peut-être le plus commun aux êtres humains de toute la planète, une demande en mariage, mais en filigrane c'est le problème de communication, l'entêtement et la fixation sur des futilités, quitte à tout perdre, qui ressortent et que le public semble avoir saisi. Le tout a été présenté avec grande subtilité et dans un moule comique. Durant 55 minutes, El-Khotba tourne autour des pratiques d'une société, non située dans le temps ni dans l'espace mais reconnue, la planète des hommes. L'adage "ce sont les intelligents qui cèdent les premiers" trouve sa place et surtout tout son sens dans cette parodie intemporelle où les hommes, mais aussi les femmes, qui peuvent être voisins (puisqu'il s'agit d'un voisin qui vient demander la main de sa voisine) ou qui habitent l'autre bout du monde font l'impossible pour ne pas s'entendre et non pas l'inverse. Leurs idées contrastent totalement avec leurs actes. Les belles paroles, les tenues bon chic, bon genre, les belles manières sont réduites en cendres, dès qu'il y a malentendu. Et les hommes – peut-être des voisins – se disent des méchancetés qu'ils ont gardées et cachées comme une arme redoutable. L'anathème fait ravage : boiteux, pouilleux, misérables, moches... sont entre autres les noms d'oiseaux qui giclent au moindre malentendu – et le plus futile. La crise de la quarantaine d'un voisin, une voisine vivant la même hystérie, se marier à tout prix ou mourir, peu importe d'un arrêt cardiaque ou autre maladie rare... sont de petites histoires qu'on retrouve dans ce spectacle. Mais quand l'occasion se présente, elle est gâchée par l'inutile, le futile, l'éphémère, et c'est humain depuis la nuit des temps ; cependant, il y a eu union malgré la guerre des mots. Les trois comédiens sur scène ont fait une prestation irréprochable, ils semblent être rodés à ce genre de spectacle, sachant qu'ils ont entamé leur tournée par la capitale des Aurès.