Résumé : Samir décide de faire profiter sa petite famille de la belle journée printanière. Il prend la route de la côte et se dirige vers le même restaurant où il rencontrait Ilhem. L'enfant un peu dépaysé, se déride vite à la vue d'un espace de jeu. Mordjana s'inquiète un peu, mais Samir la rassure : un enfant est fait pour jouer, tomber et se relever. Il hausse les épaules et prend une fourchette pour piquer dans son assiette. Mais en réalité, il faisait des efforts pour paraître naturel et décontracté devant sa femme. Son esprit travaillait à mille à l'heure. Il repensait à Ilhem... Elle portait son enfant ! Encore une fois, il sentit un pincement. Cette femme se détournait de lui et il n'admettait pas encore qu'elle lui jouait un tour aussi vil. Empêcher un père de donner son nom à son fils n'était commode ni pour lui, ni pour elle d'ailleurs. Pourquoi refusait-elle de l'épouser ? Il aurait même accepté, avec un consentement mutuel, de divorcer à l'amiable après son accouchement. Mais Ilhem ne voulait rien savoir... Elle s'était contentée de lui apprendre qu'elle était enceinte et qu'il était le père du bébé. Cela fait plusieurs semaines maintenant qu'ils ne s'étaient pas revus, et elle refusait même de répondre à ses coups de fil. Il pousse un soupir qui n'échappe pas à sa femme. Elle fronce les sourcils : -Tu sembles pensif Samir... Qu'est-ce qui te préoccupe ? Il sursaute et regarde autour de lui. Amir jouait avec des enfants, il avait abandonné son spiderman sur le gazon et s'était joint à un petit groupe qui suivait l'ascension d'un escargot sur une tige. Mordjana le secoue : -Tu n'as pas répondu à ma question, Samir... Qu'est-ce qui te rend si distant ? - Heu... Je... Je regardais Amir... - Oui... Ça, je l'ai remarqué... Mais tu avais secoué la tête et soupiré d'un air triste... Il lève la main pour l'interrompre : -Je ne suis pas triste... Tout juste un peu dépassé par les évènements... Je pensais à cet enfant... -Amir ? Elle sourit : -Il n'a pas encore fait ses pas chez nous que te voilà tout remué. Comment vas-tu donc réagir le jour où il nous quittera pour se rendre à l'école? -Comme tous les parents d'enfant en âge d'être scolarisé. Elle rit : -Je ne crois pas... Tu es déjà très épris, voire même trop épris... -Heu... Ne sois pas jalouse... Je suis son père ... Elle continue de rire : -On dirait que tu redeviens un enfant toi aussi. Il se gratte la tête et prend un air dégagé : -Peut-être... On dit bien qu'au fond de chaque homme, somnole un enfant. -Jamais adage n'a été aussi juste que dans ton cas aujourd'hui. Essoufflé et en nage, Amir revint vers eux en serrant son jouet dans ses bras. Mordjana le débarrasse de sa veste et lui essuie le visage et les mains : -En voilà assez pour aujourd'hui... Tu es tout essoufflé. Il la regarde et sourit. Il avait les joues rouges et les yeux pétillants. La jeune femme l'aide à se mettre sur une chaise et met une assiette devant lui pour le servir. -Tu as sûrement faim après toutes ces courses effrénées. Attends, laisse-moi te mettre une serviette autour du cou. Amir se laisse docilement faire. Mordjana découpe la viande et les légumes dans son assiette, puis lui verse un grand verre d'eau : -Allez, mange mon bébé. L'enfant prend une fourchette et se met à manger de bon appétit. Samir le regarde en souriant : -Il semble heureux d'être avec nous, tu ne trouves pas Mordjana. -Bien sûr qu'il est heureux... N'est-ce pas, bébé ? La bouche pleine et les mains occupées, Amir les regarde tour à tour sans répondre. Mais la lueur de gaîté dans ses yeux ne trompait pas. -Je t'ai acheté plein de jouets et des cahiers de coloriage... Tu ne vas sûrement pas t'ennuyer dans ta chambre. Amir mangeait toujours. Il avait déposé son jouet sur la table à côté de lui et paraissait bien plus détendu que lorsqu'il avait quitté l'orphelinat. À sa grande surprise, à la fin du repas, il eut droit à une belle coupe de glace au chocolat, et même à une balade au bord de la mer sur les épaules de son père. Enfin, rompu de fatigue, il se laisse aller contre Mordjana et s'endormit sans demander son reste. Ils décidèrent alors de rentrer à la maison. Y. H. (À suivre)