Sauf remontée rapide et spectaculaire du prix du baril du pétrole, l'Algérie, dont les ressources financières vont en s'amenuisant ces derniers mois, pourrait frapper de nouveau aux portes des institutions financières internationales. Moins de quinze jours après que le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, intervenant devant les walis réunis à la résidence El-Mithak, a évoqué le possible recours à l'endettement extérieur, le ministre du Commerce, Bakhti Belaïb, engage ce qui semble être la phase exploratoire. En effet, jeudi, alors que l'opinion venait tout juste de prendre connaissance avec inquiétude des nouvelles taxes que le gouvernement entend durcir dès janvier prochain, à travers la loi de finances 2016, dont l'avant-projet a été examiné et adopté mercredi en réunion du gouvernement, le ministre du Commerce recevait dans son bureau, aux Bananiers, le chef de mission en Algérie du Fonds monétaire international (FMI), Jean-François Dauphin. Un communiqué du département de Bakhti Belaïb, rendu public à l'issue de la rencontre, soulignait que les deux hommes se sont entretenus sur la "situation économique et financière dans le contexte de la crise générée par la baisse des prix des hydrocarbures", précisant qu'ils ont échangé des points de vue "sur les mesures à prendre pour alléger et réduire l'impact de la conjoncture économique et sociale du pays". Au regard de la nature de l'échange entre les deux parties, à savoir autour des mesures de l'allégement de l'impact de la crise financière sur l'économie nationale et, partant, sur la société, il est fort à parier que la rencontre est un prélude à des discussions ultérieures autour de l'éventualité de financements d'investissements par l'institution de Breton Woods. Il est peu vraisemblable, en effet, que le déplacement du représentant du FMI chez Bakhti Belaïb a eu lieu à titre informatif. Par ailleurs, le FMI n'étant pas un organisme philanthrope, on voit mal Jean-François Dauphin dans le rôle de conseiller désintéressé. Tout au plus, on aurait pu comprendre que ce dernier s'intéresse aux mesures prises pour atténuer le choc de la crise financière si l'Algérie avait encore des dettes à rembourser au FMI, comme ce fut le cas dans les années 1990. Or, on n'est plus dans la situation d'endettement, l'Algérie ayant racheté la totalité de sa dette extérieure, grâce à l'opulence financière induite par le prix fort du baril de pétrole sur les marchés internationaux. L'Algérie a payé par anticipation sa dette extérieure et a même prêté 5 milliards de dollars au FMI en 2012. Mais pour avoir échoué à mettre en place une économie alternative aux hydrocarbures, l'Algérie, surprise par une chute drastique du prix du baril, pourrait se retrouver contrainte de recourir à l'endettement extérieur pour maintenir le rythme de développement. Les experts le disent, le Premier ministre ne l'a pas exclu. Le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhelfa, qui a pensé pouvoir éviter le recours à l'endettement extérieur, en sollicitant la grosse manne financière qui circule dans le circuit de l'informel, ne devra pas se rendre à la réalité de ce que cela relève plus du vœu que de la possibilité économique tangible. Le fameux programme de mise en conformité fiscale volontaire (MCFV), qui devait permettre l'injection des grosses fortunes amassées dans les activités informelles dans le circuit bancaire, est, pour ces premiers mois, loin d'être une réussite. L'administration fiscale parle d'un début timide. Si le cours du Brent ne remonte pas, l'Algérie, pour financer ses investissements, aura besoin de trouver de la ressource financière en dehors de la fiscalité ordinaire, insuffisante et, de surcroît, mal recouvrée. Une année d'un cours de baril bas a suffi pour dévoiler la fragilité de la situation financière du pays. À juin 2015, les réserves de change ont été de l'ordre de 159,027 milliards de dollars. À la même période, le Fonds de régulation des recettes (FRR), qui servait à combler les déficits budgétaires, se réduisait à 3 441,3 milliards de dinars, tout juste de quoi assurer les équilibres pendant deux ans. Ces indices financiers ne prêtent pas à l'optimisme.