Ni les difficiles conditions de l'occupation ni l'appel au boycott des islamistes n'ont empêché les Palestiniens d'élire le candidat du consensus. Mahmoud Abbas a désormais toutes les cartes en main pour relancer le processus de paix avec Israël. Son éclatante élection, dimanche, ne laisse pas l'ombre d'un doute quant à la confiance que place en lui son peuple pour conclure la paix. Le déroulement exemplaire du scrutin est un atout supplémentaire pour l'Autorité palestinienne, de l'avis même des observateurs internationaux. Michel Rocard, l'ancien Premier ministre français, présent sur les lieux, estime que l'élection de Mahmoud Abbas devrait donner à l'Autorité palestinienne “une respectabilité internationale”. “Le gouvernement israélien ne pourra pas nier pas éternellement cette respectabilité”, a-t-il ajouté. Ces déclarations constituent la meilleure preuve de la leçon de démocratie donnée au monde par les Palestiniens à l'occasion de cette élection. Israël est plus que jamais tenu de relancer sérieusement les discussions de paix avec Abou Mazen, désormais libre de ses mouvements. En effet, s'il n'avait pas les coudées franches, du temps où il était Premier ministre de Yasser Arafat, aujourd'hui c'est lui qui détient les rênes du pouvoir. Mieux, son score qui avoisine les 70% des suffrages exprimés est en quelque sorte un chèque en blanc pour négocier avec l'Etat hébreu. Le taux de participation à cette élection présidentielle, plus de 65% de votants, est un argument supplémentaire de l'engagement des Palestiniens dans le chemin de la paix. De l'avis des analystes de la scène proche-orientale, l'élection de Mahmoud Abbas peut être perçue comme une relance du processus de paix. C'est du moins l'opinion du nouveau vice-Premier ministre israélien, Shimon Pérès, qui pense que “un nouveau processus va commencer. Un important changement est intervenu, et j'espère que la nouvelle direction palestinienne est le reflet d'un changement dans la rue palestinienne”. L'espoir de paix que la communauté internationale perçoit à travers les résultats de l'élection présidentielle ne peut être concrétisé qu'avec le seul engagement de Mahmoud Abbas dans la voix de la paix. Il appartient également à l'autre partie, Ariel Sharon, de faire aussi preuve d'une réelle volonté de paix, pour que le processus de paix ait réellement des chances d'aboutir. Seule l'Administration Bush, par des pressions, est en mesure de forcer la main au leader du Likoud afin qu'il mette un terme à ses tergiversations dans les négociations de paix. Il est grandement temps de forcer la main à Ariel Sharon, afin qu'il revienne au contenu de la feuille de route du quartet international, document de base pour la concrétisation de la paix dans cette région du monde, en situation de guerre depuis plus d'un demi-siècle. Certes, le plan de désengagement unilatéral de la bande de Gaza constitue une avancée en direction de la paix, mais ne répond nullement aux dispositions de la feuille de route. Le peuple palestinien a fourni, dimanche, un gage de sa volonté de paix. Israël n'a plus le droit d'agir à sa guise en imposant sa “propre paix”. Saeb Erekat, le ministre palestinien chargé des Négociations a bien résumé la nouvelle situation : “La balle est dans le camp des Israéliens. S'ils continuent à coloniser, à construire le mur et à nous agresser, alors tout s'effondrera.” En plus clair, l'espoir de paix, né de l'élection de Mahmoud Abbas, est fragile. Des concessions sont nécessaires de part et d'autre, parce que l'embrasement, tant recherché, par les extrémistes des deux camps guette. 62,3% des voix pour Abou Mazen Les Palestiniens, qui se rendaient aux urnes dimanche pour leur première élection présidentielle depuis neuf ans, ont offert une large victoire à Mahmoud Abbas. Selon les résultats définitifs, après dépouillement des 16 circonscriptions, le candidat du Fatah l'emporte avec 62,3% des voix, devant Moustafa Barghouthi qui recueille quelque 20% des voix, a déclaré un membre de la Commission électorale. Victoire dédiée à Yasser Arafat Le chef de l'OLP, Mahmoud Abbas, a proclamé, dimanche dernier, sa victoire à la présidentielle palestinienne, la dédiant à la mémoire du défunt leader historique Yasser Arafat. “Nous dédions cette victoire à la mémoire du dirigeant martyr Yasser Arafat et nous la dédions aussi aux âmes de nos martyrs, de nos blessés et aux 11 000 prisonniers derrière les barreaux”, a-t-il déclaré lors d'une réunion à Ramallah en présence de centaines de partisans en liesse. K. A.