Hier, à l'ouverture de la 4e session criminelle, le tribunal criminel près la cour d'Oran a jugé une affaire de stupéfiants impliquant six personnes poursuivies pour détention, transport et trafic de drogue en bande criminelle organisée. Selon l'acte d'accusation, les inculpés s'étaient spécialisés dans l'importation du cannabis marocain, qu'ils stockaient à Oran, avant de l'acheminer vers la région-est du pays. Pour les auteurs de l'enquête - qui a conduit quatre accusés devant le juge (deux sont toujours en fuite) - le modus operandi était simple et chaque élément du groupe était chargé d'une mission précise. B. Bouziane, 43 ans, considéré comme la tête pensante du groupe, achetait la marchandise et la réceptionnait à Sidi-Boudjenane, à la frontière algéro-marocaine, des mains de deux narcotrafiquants marocains, Khelil et Hamouda, Z. Allaoua, 49 ans et transporteur clandestin, convoyait la drogue jusqu'à Oran, sous la surveillance de B. Abdelkader, 40 ans et brigadier de police, qui devait "sécuriser" la route ; et, à l'arrivée, F. Houari la stockait dans sa maison à Sidi-El-Bachir, le temps d'être acheminée vers l'une des villes de l'Est. Selon l'acte d'accusation, début janvier 2015, les éléments de la police sont informés de l'existence de ce groupe spécialisé dans le trafic de kif traité entre les régions ouest et est du pays. Des investigations sont alors lancées et aboutissent le même mois à l'interception d'un véhicule sur l'autoroute Est-Ouest transportant plus de 30 kilos de résine de cannabis, cachés dans les ailes et le pare-chocs arrière. Une perquisition au domicile de F. Houari, à Sidi El-Bachir, permettra la saisie de plus de 40 kilos de kif et environ quatre millions de dinars. Tous les éléments du groupe seront alors interpellés à l'exception de S. Ayachi et D. Abdelkader, qui réussiront à s'évanouir dans la nature. À la barre, hormis F. Houari, qui ne peut nier les faits qui lui sont reprochés, tous les autres tenteront de réfuter les accusations qui pèsent sur eux. B. Bouziane, que Houari désigne comme étant le propriétaire de la marchandise, rejette tout en bloc, n'hésitant pas à revenir sur ses déclarations dans lesquelles il reconnaissait tous les faits. "Toutes vos déclarations devant la police et le juge d'instruction correspondent aux faits de l'enquête. C'est donc que vous étiez effectivement impliqué dans ce trafic", s'énerve le procureur sans réussir, cependant, à ébranler la nouvelle position de l'accusé. "Je n'ai pas été arrêté avec eux, ni en possession de drogue. Et tout ce que j'ai dit précédemment m'a été dicté par la police lors des interrogatoires", soutient-il mordicus. Z. Allaoua, qui était au volant de la voiture en route pour Oum El-Bouaghi, dit ignorer que la voiture contenait de la drogue. Lui aussi revient sur les déclarations faites au juge d'instruction, que le président s'empresse de lui relire, pour affirmer être innocent. "B. Bouziane est un voisin et ami mais je n'ai aucun lien avec ce trafic", a-t-il indiqué. Quant à B. Abdelkader, brigadier de police, à 9 mois de la retraite, il jure qu'il n'est en rien concerné par cette affaire. Et de préciser : "Je ne suis pas fou pour ficher en l'air toute ma carrière et mettre en danger mes cinq enfants." S'il s'est déplacé à Sidi-Boudjenane, en janvier dernier, c'était pour acheter des pièces détachées pour son véhicule et c'est "par hasard que je me suis retrouvé dans un café avec ces gens que je ne connais pas", a-t-il asséné. Pour le représentant du ministère public, les accusations portées contre les inculpés sont fondées. "C'est une bande organisée bien structurée qui faisait du trafic de drogue entre l'est et l'ouest du pays. Certains étaient chargés de la réception de la marchandise, d'autres du transport et d'autres encore du stockage. L'enquête de la police l'a prouvé et les inculpés ont avoué les faits lors de l'enquête préliminaire", a-t-il assuré en précisant que le trafic de drogue est aujourd'hui fortement lié aux activités terroristes et le trafic d'armes. Pour cela, il a mis tous les inculpés sur un pied d'égalité et requis à leur encontre la perpétuité sans possibilité de se prévaloir de circonstances atténuantes. S. O.A.