S'il fallait encore une démonstration de la cacophonie qui règne en haut lieu, elle vient d'être fournie par le recteur de la Grande Mosquée de Paris qui a dans les faits un rôle d'ambassadeur bis, vu le prestige dont jouit l'institution qu'il dirige. L'honorable institution coûte au contribuable algérien la somme de deux millions d'euros. Soit 25 milliards de centimes dont la destination finale a soulevé des questions légitimes. Elles ont été posées au ministre des Affaires religieuses Mohamed Aïssa devant la commission des affaires étrangères de l'APN. En réponse, il a annoncé le lancement de la procédure d'acquisition de la mosquée et la levée du gel de son financement. "Les procédures visant à faire de la mosquée de Paris une propriété de l'Etat algérien ont été entamées officiellement par le biais de l'ambassade d'Algérie à Paris", a affirmé le ministre. Selon lui, la démarche s'appuie sur une loi française stipulant qu'"un pays étranger qui finance une association de droit français peut, passés 15 ans, prétendre à la propriété de cette entité, ce qui est le cas pour la Grande Mosquée de Paris". Dans un communiqué, le recteur de la GMP, le Franco-Algérien Dalil Boubakeur, a démenti cette procédure, soulignant que toutes les activités de sa mosquée "s'inscrivent dans le cadre de la loi française" et que "son statut n'a actuellement subi aucune modification". "Toutes spéculations ou informations contraires ne sont qu'une vue de l'esprit journalistique, et donc nulles et non avenues", a-t-il affirmé. Dans la bouche de Boubakeur, les propos du ministre sont donc spéculations journalistiques. Le recteur a toutefois fait état d'"un projet" qui "étudierait la perspective juridique d'une fondation franco-algérienne dont le but viserait à préserver le patrimoine des biens et lieux de culte de l'Algérie en France, mais aussi à développer des actions culturelles en direction de la communauté". Sauf que ce projet fédérateur, omet-il de mentionner, ne progresse pas depuis plus de dix ans. Et il n'y a aucun signal qu'il le sera. Premier lieu de culte musulman construit en France métropolitaine, en hommage aux dizaines de milliers de soldats musulmans morts pour la France lors de la Première Guerre mondiale, la GMP est gérée par une "société des habous et des lieux saints de l'islam" de droit français (loi 1901), présidée par Dalil Boubakeur. L'Algérie assure un financement de deux millions d'euros à la Grande Mosquée de Paris, qui est le symbole de l'islam en France, pays de la plus grande communauté musulmane d'Europe. La fédération de la GMP compte une centaine de mosquées parmi quelque 2500 lieux de culte musulman sur le territoire français. R. I./Agences