Ces agents sont employés par 228 PME et PMI publiques en cessation de paiement et candidates à la privatisation. L'argument utilisé, hier, par Tayeb Louh pour justifier les privatisations engagées par le gouvernement est irrépressible. Sans cette démarche, des milliers de travailleurs se retrouveront à la rue. C'est la conviction profonde du ministre du travail et de la sécurité sociale. Au cours d'une conférence de presse tenue au siège de son département, il a appuyé son plaidoyer par le sort des 21 872 travailleurs de 228 PME et PMI publiques n'ayant pas perçu leur salaire, pour certains, depuis six mois et pour d'autres depuis une année. “Si cette situation se poursuit, ces entreprises seront bientôt en cessation de paiement”, a averti le représentant de l'exécutif. À ses yeux, le moyen ultime de préserver les emplois susmentionnés est dans la mise en vente de l'outil de production ou dans le partenariat. L'engagement pris par le Conseil des participations (CPE) pour le sauvetage de 23 000 postes d'emploi à la privatisation constitue, d'après M. Louh, une garantie. Pour autant, le ministre ne dit pas si les acquéreurs vont se soumettre à cette condition du CPE ou si les effectifs concernés iront grossir les rangs des chômeurs. Une aussi sombre alternative ne préoccupe aucunement l'exécutif. Dans son bilan, le ministre du travail s'est félicité de la baisse persistante du chômage. Selon des estimations de l'Office national des statistiques (ONS) qu'il a divulguées devant les journalistes, le taux de chômage est moins de 22%. “Si on prend en compte les travailleurs activant dans le secteur informel, il est de moins de 17%”, a révélé M. Louh. Une série de motifs expliquent, selon lui, la régression du nombre de sans emploi, dont la relance des secteurs agricole, du bâtiment et des travaux publics (BTPH) ainsi que l'amélioration du climat général de l'investissement. Le bâtiment aurait enregistré une hausse des effectifs de l'ordre de 7,7%, l'investissement privé de 9,5%. À l'échelle macro-économique, la diminution de la dette (23,2 milliards de dollars) et de ses services et l'augmentation des réserves de change (41,5 milliards de dollars) sont les traits du tableau très reluisant de la situation socio-économique dressé par le ministre. Les dividendes étant à ses yeux incontestables, ils se résument à l'augmentation de la masse salariale de 1 129,3 milliards de dinars en 2003 à 1 220,1 en 2004 (soit à hauteur de 8%) et au relèvement du revenu des ménages (9%). Autant d'améliorations ont eu pour effet d'apaiser le climat social, a estimé l'hôte des journalistes. Son département a recensé 45 mouvements de grève en 2004 contre 173 en 1999. Le rôle du ministère dans l'instauration d'un dialogue constant avec le partenaire social a été également mis en exergue par Tayeb Louh. Celui-ci s'est enorgueilli d'avoir reçu 14 organisations durant l'année écoulée, d'en avoir enregistré 8 nouvelles et d'avoir augmenté le montant des subventions pour l'ensemble des syndicats. Effectivement, le tableau a tout l'air d'être parfait sauf qu'il regorge de beaucoup de zones d'ombre. Le problème inextricable des travailleurs licenciés abusivement en est une. Depuis 1999, année de l'installation de la commission ad hoc, 1 027 salariés sur un ensemble de 3 178 sont toujours en attente de leur réintégration. “J'ai donné des instructions fermes pour que leurs cas soient réglés”, a affirmé le locataire du département du travail. Une autre déficience atténue son bilan éclatant. Elle a trait à l'ampleur du travail informel. Sur 5 129 organismes visités par les inspecteurs du travail en 2003, 6 314 travailleurs n'étaient pas déclarés, soit le tiers des effectifs. Et ce n'est que la face visible de l'iceberg. Parmi les employés au noir figurent des étrangers. En 2004, la main-d'œuvre étrangère était évaluée à 12 565 travailleurs dont 615 d'entre eux n'avaient pas de permis de travail, suite à un contrôle effectué auprès de 493 entreprises. L'exploitation des enfants est une énième facette de cette traite. En l'absence de statistiques, le département de Tayeb Louh s'est contenté de mettre en place un arsenal préventif, dont l'augmentation des amendes contre les employeurs. S. L.