Le jugement de la haute juridiction européenne met à nu l'hypocrisie du Conseil et de la Commission qui ont cautionné le pouvoir "économique" de Rabat et donné des ailes à ce pays, déterminé à imposer le fait accompli colonial. Le territoire du Sahara occidental et ses richesses ne sont pas du ressort de la souveraineté marocaine. Cette vérité est confirmée par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE/ Luxembourg). Au terme d'une longue bataille juridique, qui a duré plus de 4 années, le tribunal européen a, en effet, tranché en faveur du Front Polisario, le représentant légitime du peuple sahraoui, dans "l'affaire T512/12", opposant ce dernier au Conseil et à la Commission européens. Dans un jugement rendu ce jeudi, la CJUE annonce l'abrogation de la "décision 2012/497/UE" du Conseil européen du 8 mars 2012, portant sur "la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres entre l'Union européenne et le royaume du Maroc relatif aux mesures de libéralisation réciproques en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche, au remplacement des protocoles n° 1, 2 et 3 et de leurs annexes et aux modifications de l'accord euroméditerranéen établissant une association entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et le royaume du Maroc, d'autre part", du fait de "l'application dudit accord au Sahara occidental". En prononçant ce verdict avec "effet immédiat", la CJUE conforte, voire s'aligne sur les positions défendues jusque-là, non seulement par le Polisario en sa qualité de partie au conflit, mais également par l'ONU (secrétariat général aux affaires juridiques), l'Union africaine (bureau du conseiller juridique), le Parlement européen (service juridique), des Etats et des organisations, ainsi que par des juristes de renom et des chercheurs en droit international qui n'ont pas cessé d'alerter sur les violations du droit international par le Maroc. Ainsi, le jugement de la haute juridiction européenne met à nu l'hypocrisie du Conseil et de la Commission qui ont cautionné le pouvoir "économique" de Rabat et donné des ailes à ce pays, déterminé à imposer le fait accompli colonial. Ce verdict, prononcé la veille du 14e congrès du Front Polisario (16-20 décembre prochain), est un désaveu infligé au Maroc, visant à le remettre sur les rails de la légalité internationale et à le pousser à la table des négociations. Il apparaît comme un message de la CJUE adressé, entre autres, aux réfugiés sahraouis, frappés durement par des inondations, qui attendent la part d'aide humanitaire censée leur revenir de droit, alors que leur pays recèle des richesses et continue d'être pillé par le voisin de l'Ouest, au vu et au su de tout le monde. Réagissant le jour même de l'arrêt de la CJUE, Mhamed Khadad, membre du secrétariat national du Polisario, est convaincu que ce verdict est "une suite de l'avis rendu par la Cour internationale de justice en 1975", qu'il aura un impact certain sur les prochaines négociations maroco-sahraouies et qu'il fera sortir la question sahraouie de "l'illégalité" imposée par le Maroc vers la légalité internationale. Selon M. Khadad, le tribunal de l'UE, par son jugement, reconnaît que le Rabat n'a pas de "souveraineté" dans l'ex-colonie espagnole et établit "la capacité de Front Polisario à agir en justice" et à être le "seul habilité à décider des conditions d'exploitation des ressources naturelles". D'où son appel aux capitales européennes et aux entreprises exerçant sur le territoire et les eaux sahraouis pour "respecter" la décision de justice de la CJUE et pour se conformer à la légalité internationale. H.A.