C'est un chiffre hallucinant qu'a révélé, hier, le ministre de l'Agriculture, Saïd Barkat, quant à l'ampleur des méfaits de la mafia du foncier agricole sur le territoire de la capitale. Mille huit cents hectares des terres destinées à l'agriculture ont été littéralement “bouffées” par le béton, ces dernières années, dans les différentes communes de la wilaya d'Alger. Ce détournement des terres de leur vocation originelle s'est effectué via la conclusion de “500 transactions illicites et illégales”. Les mots et les chiffres sont sortis de la bouche du ministre du secteur, hier, lors de son passage à l'émission “Question de l'heure” de la Chaîne III. Saïd Barkat n'a pas expliqué comment cette mafia et pourquoi les pouvoirs publics ont fait preuve de passivité à l'endroit des fauteurs. Il s'est contenté de noter que “certaines personnes ont outrepassé la loi” et que le phénomène “n'est pas marginal”. Pourtant, le ministre soutient que son département, à travers ses démembrements, “veille à l'utilisation agricole” des terres du domaine privé (70%) ou public (30%) appartenant à l'Etat. Il se félicite presque que seulement 32 000 hectares, une surface déjà énorme du reste, de terres agricoles ont été ravagés par le béton en 40 ans sur l'ensemble du territoire national. Le ministre a laissé s'échapper cette phrase lourde de sens : “Cette année 2005, on va commencer à respecter la loi.” La panacée, d'après Saïd Barkat, viendrait de la loi-cadre de l'orientation agricole qui devrait être soumise au Parlement lors de la session du printemps. Une loi qui permettrait de faire un “cadrage politique” en vue de préserver les terres agricoles de l'avancée du béton. Il précise que cette loi prévoit des mécanismes de coercition. Un autre projet de loi portant sur l'exploitation des terres privées de l'Etat (EAC et EAI) devrait, selon lui, garantir une meilleure “veille” sur le patrimoine agricole national. Le ministre a aussi levé le voile sur la pratique scandaleuse du morcellement des exploitations en de petites parcelles. “Plus de 70% des EAC sont constitués de moins de10 hectares”, a annoncé Saïd Barkat avertissant que ce phénomène “est mortel pour l'agriculture”. Autre gâchis : le ministre de l'Agriculture révèle que tous les propriétaires des exploitations morcelées n'ont pas bénéficié d'un sou du Fonds de développement agricole (FNRDA). En d'autres termes, ce sont 70% des EAC qui ont été laissés en “jachère” par le département de Saïd Barkat, avec tout ce que cela suppose comme désinvestissement dans le secteur et de décrue de la production nationale. Cela n'empêche pas le ministre d'afficher un tableau de bord “clinquant” de son secteur. Ainsi l'agriculture représente 10% du PNB, absorbe 25% de la population active et réalise une croissance moyenne de 8%. À en croire le ministre, le Programme national du développement agricole (PNDA) a généré quelque 822 000 emplois, dont 300 000 permanents durant les autres dernières années. Barkat a également annoncé que la production agricole annuelle avoisine les 8 milliards de dollars. S'il se félicite du fait qu'il n'y ait plus de pénurie de fruits et de légumes sur le marché, le ministre n'a pas pu expliquer l'envolée des prix de ces produits qui cadre mal avec la sacro-sainte règle de l'offre et de la demande. “De toute façon, les Algériens achetaient l'orange importée et de mauvaise qualité il y a quelques années à 80 dinars !” a répondu simplement le ministre à une question d'un journaliste sur les prix exorbitants des fruits et légumes. Pas d'augmentation des prix du pain et de la semoule Le ministre de l'Agriculture a annoncé, hier, que les prix du pain et de la semoule ne connaîtront aucune augmentation cette année. “Les prix du pain et de la semoule n'augmenteront pas, nous avons des stocks de blé pour de longs mois encore”, a, en effet, précisé Saïd Barkat lors de son passage à la Chaîne III. Menace acridienne : “Nous sommes prêts” Saïd Barkat rassure les Algériens que les pouvoirs publics ont suffisamment de moyens matériels et humains pour venir à bout des essaims de criquets qui menacent le territoire national. Tout en prévoyant une prochaine infestation pour la fin février, le ministre dit que cela ne posera aucun problème : “Nous sommes prêts !” affirme-t-il, précisant que 1,5 million d'hectares ont été d'ores et déjà traités. H. M.