Les émissions politiques diffusées sur les chaînes de télévision privées semblent irriter profondément les autorités au point d'amener l'Autorité de régulation de l'audiovisuel (Arav) à émettre une nouvelle mise en garde dans laquelle elle rappelle les lignes rouges à ne pas dépasser, tout en exhortant les propriétaires des médias lourds à éviter le parti pris dans ce type de programmes. L'instance présidée par Miloud Chorfi assure avoir relevé "plusieurs dangereux dépassements et dérives" à travers certaines chaînes de télévision dont les programmes portent atteinte à la sécurité nationale, à l'ordre public et à la dignité humaine". L'Arav évite cependant de préciser quelles sont les chaînes de télé auxquelles est adressée cette mise en garde, ni les programmes qui sont à l'origine de ce nouvel accès de colère de l'instance. Le communiqué de l'Arav ne contient, ainsi, aucune précision à ce sujet et son contenu ne reste un concentré des principes qui doivent régir le fonctionnement des médias lourds sur le double plan éthique et déontologique. Un rappel, en somme, des grands axes du discours prononcé par son président, M. Chorfi, il y a deux mois, à l'occasion de la célébration de la journée nationale de la presse. L'instance appelle, en effet, dans ce cadre, à "éviter de recourir à l'insulte et à la personnalisation comme moyen pour augmenter l'audimat et semer la zizanie entre les Algériens". Tout en appelant à la responsabilité, l'Arav exhorte les directeurs de ces chaînes de télé à "éviter de reproduire ces agissements nuisibles à la société, à respecter les lois de la République et à revoir le contenu de ces programmes". L'autorité va jusqu'à dicter aux chaînes de télévision la manière avec laquelle elles doivent choisir, façonner et conduire leurs émissions, notamment politiques, de sorte à créer "un équilibre total dans les types et le contenu des programmes diffusés, tout en veillant à éviter l'exclusion et le parti pris dans les programmes interactifs politiques". L'Arav rappelle, à ce sujet, que "les débats politiques diffusés sur les chaînes de télévision en Algérie doivent être toujours caractérisés par le respect des principes démocratiques consacrés par la Constitution". Selon des indiscrétions, l'Arav aurait été contrainte de commettre ce nouveau communiqué, émis, selon toute vraisemblance, suite à des reproches qui lui auraient été faits pour n'avoir pas réagi à la diffusion sur la chaîne Ennahar TV de l'entretien avec le chef du groupe parlementaire du FLN à l'Assemblée nationale, Baha Eddine Tliba. Ce dernier, lors de cette interview, s'était adonné à un lynchage d'une rare violence contre l'ex-patron du DRS, le général Toufik. Le langage emprunté pour la circonstance par le député du FLN a choqué y compris dans le camp du pouvoir. Et si l'Arav réagit aujourd'hui, près d'une dizaine de jours après cette sortie médiatique tonitruante, elle ne l'a surtout pas fait de plein gré. C'est que les critiques sur un flagrant parti pris d'une structure censée se positionner en gendarme d'un secteur aussi sensible que stratégique sont devenues tellement pesantes que ses responsables ne pouvaient se comporter autrement. Cette nouvelle mise en garde de l'Arav, adressée aux responsables des chaînes de télévision et dénonçant de graves dépassements et atteintes à l'éthique journalistique, aurait été, sans aucun doute, bien accueillie par tous les citoyens et, notamment par les professionnels du secteur si l'attitude de cette instance de régulation n'était pas caractérisée par une sélectivité et différence de traitement criantes de ces mêmes dérives, selon qu'elles émanent d'organes proches ou réfractaires au pouvoir en place. H.S