Amr Moussa a eu la gentillesse de se déplacer à Alger pour nous expliquer que les gesticulations algériennes au sujet d'une prétendue réforme de la Ligue arabe sont sans effet. La grandiloquence et la bouffissure d'une diplomatie qui aurait réhabilité l'Algérie sur la scène internationale s'en trouvent rabattues. Le secrétaire général de la ligue, insatisfait du reniement algérien que Belkhadem est allé reconnaître au Caire, est venu nous le confirmer à domicile. Et nous prenant à témoin, il atteste qu'il y est et y restera jusqu'en 2006 et fait promettre à notre ministre des affaires étrangères que cette question (de la réforme de la ligue arabe) ne sera pas à l'ordre du jour du prochain sommet (qui aura lieu en mars prochain à Alger). La messe est dite. “Le dossier du secrétariat général tournant est clos et ne sera pas ouvert”, précise Amr Moussa, comme pour disposer qu'il ne s'agit pas d'un report, mais d'une rétraction pure et simple. Les ressources du verbiage diplomatique sont illimitées et offrent l'échappatoire d'un “accord total” entre la ligue et Alger. Ce qui offre au secrétaire perpétuel de la ligue de houspiller la presse algérienne, déversoir coutumier des rancœurs “fraternelles” et des ressentiments officiels. Elle serait en train d'entraver le travail de la ligue et de créer des tensions entre responsables arabes. Même si le ministre algérien des Affaires étrangères a oublié, il est utile de rappeler l'hystérique campagne médiatique dont il faisait, récemment encore, l'objet sur les bords du Nil. Le fait est que la diplomatie algérienne vient d'essuyer un incontestable revers sur la scène arabe, qui vient s'ajouter à l'échec du sommet arabe prévu à Alger et avorté. Il semble qu'en matière de relations internationales, le pays en est encore à une creuse conception tiers-mondiste de son action diplomatique. Particulièrement visible aux occasions mondaines, notre diplomatie fait preuve d'une patente inefficacité et d'un troublant irréalisme quand il s'agit d'événements résolutifs. C'est Belkhadem qui disait que “le Maghreb fait preuve d'une cohésion qui lui permet d'être une locomotive du monde arabe”. Ce propos, qui procède du discours magique sans rapport avec l'évidente réalité, se veut un argument à l'initiative algérienne de réforme de la Ligue arabe, alors que cette “cohésion” n'a même pas permis à l'Algérie d'assurer la tenue d'une réunion statutaire des chefs d'Etat de l'UMA. Bien que le ministre refuse de rapporter sa proposition de réforme au processus du “Grand Moyen-Orient”, il reste fort probable que le GMO ait inspiré ou tout au moins encouragé sa démarche. Il y a quelque désinvolture à renoncer si facilement à un front qu'on a soi-même ouvert, surtout au nom de valeurs démocratiques. Car l'Algérie avait raison de dénoncer la fonction appendiculaire à la diplomatie égyptienne, le système unanimiste et le squat égyptien de secrétariat général de la Ligue arabe. Il y aurait alors un cas d'imprévoyance politique suivie de décrochement diplomatique qui sanctionne l'estime internationale du pays. Or, il n'y a que ça de vrai, car quand celle-ci est entamée par des actes, elle se recouvre difficilement par des éloquences. M. H.