Les parlementaires français examineront le projet de la loi sur la déchéance de la nationalité au début du mois de février 2016. On pensait qu'il allait faire marche arrière face aux critiques qui émanent y compris de son propre parti, mais François Hollande continue à afficher un profil déterminé. Dans ses vœux aux Français le 31décembre dernier, il a fait savoir que la déchéance de la nationalité française pour les binationaux rendus coupables d'actes de terrorisme concernera également ceux qui sont nés sur le sol de l'Hexagone et qui, dans les faits, n'ont pas d'ancrage dans le pays de leurs parents. Un sondage rendu public par la chaîne d'information en continu BFM TV a révélé que plus de 80% des Français soutiennent sa démarche. Il a fait mention de cette initiative au lendemain des attentats de Paris du 13 novembre 2015, dans le cadre des mesures annoncées à la suite de l'instauration de l'état d'urgence. Il y a deux semaines et alors que sa ministre de la Justice Christiane Taubira révélait au cours d'une visite à Alger un recul du gouvernement sur cette question, le locataire du Palais de l'Elysée a concocté un projet de loi sur la révision de la Constitution qui comprend un chapitre sur l'extension de la déchéance de la nationalité française aux binationaux. "C'était un engagement du président devant le Parlement réuni en Congrès", a indiqué son Premier ministre Manuel Valls, tout en insistant sur le fait qu'il s'agit "d'une mesure symbolique" et dont "le champ d'application sera très limité". Le texte sera soumis au Parlement pour approbation le 3 février 2016. Mais déjà, de nombreux députés socialistes se déclarent opposés à un vote favorable. La fronde est menée par des têtes d'affiche du parti, à l'instar de la maire de Lille, Martine Aubry qui a dénoncé "une remise en cause du droit du sol" à travers ce projet porté "depuis longtemps par le Front national". L'ancien ministre Arnaud Montebourg a évoqué une mesure "contraire aux fondements de la République". Ne voulant pas lâcher le président de la République, d'autres responsables socialistes à l'instar de Bruno Le Roux, chef du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, lui demandent néanmoins de revoir sa copie et proposent de retirer la nationalité française à tout terroriste binational ou pas. Le gouvernement, par la voix de son porte-parole, Stephane Le Foll, vient d'indiquer que M. Hollande "s'engage à un débat" rappelant que " le souci du président de la République et du gouvernement, c'est de rassembler une majorité large sur un enjeu qui est d'abord celui de la protection des Français". À droite, Nicolas Sarkozy approuve tout naturellement l'extension de la déchéance de la nationalité aux binationaux. Il défend ce projet depuis longtemps alors que Alain Juppé, son rival aux primaires des Républicains pour la présidentielle de 2017, a qualifié la mesure d'inutile. Les critiques les plus virulentes émanent de l'extrême gauche et des écologistes. Jean-luc Mélenchon, président du Parti de gauche, a accusé Hollande et Valls de "vouloir créer un statut de Français de souche". L'une des dernières personnalités politiques à intervenir dans le débat est le défenseur des droits, Jacques Toubon. Selon lui, il ne saurait y avoir deux sortes de citoyenneté, "l'une incontestable et une autre qui peut être contestée". S.L.-K.