Tel qui rit vendredi Le choix de François Hollande de conserver dans son projet de révision constitutionnelle la déchéance de nationalité, alors que la ministre de la Justice, Christiane Taubira avait laissé entendre à Alger que cette mesure serait en fin de compte retirée, a déclenché des remous. Un président élu par le peuple de gauche qui, contre vents et marées, décide le maintien d'une mesure prônée par l'extrême droite, dans le projet de révision de la Constitution, voilà de quoi générer un profond malaise jusque dans sa propre famille politique. Le choix de François Hollande de conserver dans son projet de révision constitutionnelle la déchéance de nationalité, alors que la ministre de la Justice, Christiane Taubira avait laissé entendre à Alger que cette mesure serait en fin de compte retirée, a déclenché des remous dont le ressac n'a pas fini de susciter l'ire des adversaires de cette disposition. Profond malaise à gauche et embarras calculateur à droite, où on approuve cette disposition sans pour autant applaudir même de tiède manière. Une large frange de la gauche ne cachait guère dès jeudi 24 décembre un sentiment de trahison, après que les doutes de l'Exécutif eurent accrédité la conviction d'une marche arrière du chef de l'Etat et de son Premier ministre Manuel Valls sur l'abandon de la déchéance de la nationalité française des binationaux condamnés pour des actes de terrorisme. Mesure réclamée à droite et exigée au FN. Avec cet arbitrage, François Hollande a changé de face pour ses alliés de la gauche traditionnelle autant que pour les écologistes et même une partie de la classe politique centriste ou radicale de gauche est montée au créneau pour dénoncer avec une virulence affirmée cet acte contraire aux valeurs de la République. Il n'aura pas fallu davantage pour que les tensions s'exacerbent et qu'on accuse le président de la République actuel de faire le jeu de l'extrême droite, d'aucuns rappelant à bon escient que le premier Français à être déchu de sa nationalité fut le général de Gaulle par le régime de Vichy inféodé au nazisme - le décret fut signé le 8 décembre 1940 par le maréchal Pétain - et que la mesure à laquelle tiennent tant Hollande et Valls témoignent de leur ancrage à droite de la droite et non pas à gauche. C'est en tout cas ce que n'a pas hésité à publier le quotidien communiste italien Il Manifesto qui a titré en Une «François Le Pen» pour un article incendiaire contre le chef de l'Etat français. Peut-être pas aussi incendiaire que les propos de Daniel Cohn Bendit, de Cécile Duflot ou de Jean-Luc Mélenchon qui n'ont épargné aucun qualificatif pour dire leur ressentiment contre une démarche politique faite de «coups» circonstanciés mais aux conséquences prévisibles en...2017. Cohn Bendit parle d' «une erreur morale, une faute terrible», ajoutant que si Hollande «ne trouve pas la majorité des 3/5èmes, il doit se présenter à la primaire à droite. Il est le parfait président de la droite. Qu'il l'affirme, qu'il le dise.» Invitée de Sud Radio, même son de cloche pour l'ancienne ministre socialiste Marie-Noëlle Lienemann: «François Hollande attache plus d'importance aux idées du Medef et de la droite plutôt que de la gauche.» Quant à Cécile Duflot, elle est allée dans le même sens, rappelant qu'il s'agit d'une proposition historiquement d'extrême droite, au temps de Vichy. Ancienne ministre de François Hollande, elle a déploré qu'un candidat élu en 2012 pour «lutter contre la dérive de Nicolas Sarkozy» en vienne aujourd'hui à pratiquer les mêmes mesures que le Front national ne désavouerait pas. Signe des temps, la démarche de Manuel Valls conduit le Parti socialiste dans l'impasse et le président Hollande semble s'y complaire jusqu'à rivaliser d'ardeur avec la droite et l'extrême droite, quitte à sonner encore, croit-il, le rassemblement républicain en 2017. Mais avec cette politique, il y a fort à parier que le choix républicain sera définitivement entre le candidat de droite et la présidente du FN, le porte-étendard de la gauche, si tant est que toute la gauche veuille encore une fois être biaisée par l'incorrigible duplicité du candidat PS, n'ayant d'autre rôle que celui de figurant. De plus, l'analyse prudente de François Fillon, candidat au gouvernail des Républicains, constitue une autre inconnue avec laquelle les électeurs auront encore l'embarras du choix.