Plusieurs centaines de travailleurs et de syndicalistes ont investi, hier, le siège national de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), à Alger. "Rana maâk ya Sidi-Saïd à 100%" (nous sommes avec toi Sidi-Saïd à 100%), arborait une énorme banderole portant également le portrait du secrétaire général de l'UGTA, à l'entrée de la Centrale syndicale. Une autre banderole, tout aussi grande, livrant un autre portrait du patron de l'UGTA, accompagné du même slogan, était hissée à l'intérieur, au niveau de la salle de conférences, noire de monde. Organisé par l'Union de wilaya d'Alger de l'UGTA, avec la collaboration des Assemblées populaires communales (APC) de cette wilaya, le rassemblement était destiné à apporter son "soutien" et sa "solidarité" au n°1 de l'organisation syndicale, Abdelmadjid Sidi-Saïd, qui fait l'objet actuellement de "plaintes" — on parle de "plus de 300 plaintes" — émanant, notamment, de certains partis politiques à obédience islamiste, d'imams et d'employés du ministère des Affaires religieuses et des Waqfs, ainsi que de "personnalités". Même le groupe terroriste Djound al- Khilafa se serait apparemment mêlé, en pondant une "fetwa" contre Sidi-Saïd... Le 31 décembre dernier, Sidi-Saïd s'était attaqué, pour rappel, à ceux qui contestaient la politique de relance du crédit à la consommation. Tout à sa colère contre "certains qui, pour le plaisir de dire non, disent non", il avait usé d'un langage injurieux : "Yan aâldine imat imahoum !" Dernièrement, le concerné s'est excusé sur un site électronique, expliquant à TSA que l'expression utilisée était "une expression anodine" et qu'il n'oserait jamais porter préjudice "ni à (sa) religion ni au peuple algérien". La néobourgeoisie contre les travailleurs Hier, "la rencontre régionale des wilayas du Centre", rehaussée par la présence des membres du secrétariat national de l'UGTA, ne s'est pas déroulée comme le souhaitaient ses organisateurs. Pendant les 30 minutes qu'a duré le meeting, une partie de l'assistance a fait montre de son mécontentement aux éloges faits au patron de l'UGTA, suivies de près par celles destinées au "moudjahid el-moukhliss (combattant intègre), Abdelaziz Bouteflika". Le discours de Tayeb Ahmar Niya, secrétaire national chargé de l'organique, a été perturbé par des cris, des sifflements et des appels au calme, en dépit des slogans scandés dans la salle en faveur de Sidi-Saïd et malgré les références exposées par l'intervenant, quant à "l'organisation d'Aïssat Idir", à "l'apport des syndicalistes pendant la Révolution algérienne", mais aussi à l'importance de "la mobilisation" des travailleurs et de leurs représentants, aux conséquences préoccupantes de la baisse des prix du pétrole, à "l'efficacité de notre force" dans le "contexte national et international" actuel, voire au "devoir de s'unir pour défendre le pays". La rencontre d'hier a montré l'attachement de nombreux travailleurs à l'UGTA, "en tant que syndicat". Dans cette catégorie, d'aucuns, conscients de "l'état des lieux de la maison Algérie" et des "menaces qui pèsent sur le pays", pensent encore que "le corporatisme va casser l'UGTA". Lors de la rencontre, bon nombre d'entre eux n'ont d'ailleurs pas caché leur contrariété devant certains mots d'ordre énoncés, estimant que "ce meeting est un soutien à l'UGTA". Un syndicaliste de Bab El-Oued a déclaré, à ce propos, que "l'UGTA est à présent ciblée à travers son secrétaire général". Tout en alertant sur le climat politique délétère, il a observé que "ceux" qui s'acharnent actuellement contre la responsable du PT et les symboles de la guerre de Libération nationale veulent en finir avec l'UGTA. "Le combat est entre les gens de la chkara, c'est-à-dire la néobourgeoisie, et les travailleurs", a-t-il résumé. Il a, en outre, reconnu que "l'ordre du jour de la rencontre n'a pas été précisé au préalable" et que des travailleurs, comme ceux de l'APC de Sidi-M'hamed, sont venus très nombreux, étant informés que la réunion se pencherait sur leurs problèmes (transport, prime de panier, départ à la retraite...). De son côté, un syndicaliste d'Alger-Centre a laissé entendre que les opposants à Sidi-Saïd sont toujours actifs, en déplorant "le vacarme" suscité par "les partisans de Salah Djenouhat", ex-SG de l'Union de wilaya d'Alger de l'UGTA, longtemps considéré comme le 2e homme fort de l'organisation. "Les jours sont comptés pour eux", a-t-il dit. Hafida Ameyar