Des trois objectifs du Progdem, à savoir l'élaboration de schémas directeurs de gestion des déchets ménagers, la fermeture et la réhabilitation des décharges sauvages et la réalisation de centres d'enfouissement technique avec l'acquisition de moyens matériels, seule la première a été menée jusqu'au bout. Plus de dix années depuis l'adoption et la mise en œuvre du Programme national pour la gestion intégrée des déchets ménagers (Progdem), une évaluation s'impose devant une situation loin d'être maîtrisée. Laissant de côté pour les structures officielles la quantification des progrès dans l'appréhension de la problématique et l'accumulation d'expériences. Force est alors de conclure au peu d'efficacité sur le terrain. À un tri sélectif qui constitue la colonne vertébrale du programme qui est toujours à ses balbutiements, s'ajoutent parfois les défaillances dans l'enlèvement des déchets ménagers eux-mêmes, la surcharge des centres d'enfouissements technique (CET), la mauvaise gestion, et maintenant les difficultés de trouver des assiettes foncières pour accueillir de nouveaux sites. Pour ainsi dire, des trois objectifs du Progdem, à savoir l'élaboration de schémas directeurs de gestion des déchets ménagers, la fermeture et la réhabilitation des décharges sauvages et la réalisation de centres d'enfouissement technique avec l'acquisition de moyens matériels, seule la première a été menée jusqu'au bout. Les décharges sauvages empoissonnent encore la vie de nombreux citoyens, quant aux CET, on sait maintenant que même mieux gérés, ils ne constituent pas la panacée. Ce bilan, plusieurs cadres chargés de l'environnement l'ont énoncé à l'occasion des dernières assises sur l'actualisation du schéma général de l'aménagement du territoire (SNAT), tenues les 14 et 15 décembre 2015 à Alger, mais aussi dans plusieurs événements sur la question de la gestion des déchets. Une pression sur le foncier Dans les pays qui ont implémenté une gestion intégrée des déchets urbains et qui a donné des résultats efficients, les CET quand ils sont bien dimensionnés et judicieusement localisés, ont permis une meilleur maîtrise des flux, la création d'une véritable industrie de matières premières secondaires, un impact positif sur la santé publique et une meilleure qualité de vie dans les centres urbains grâce à la suppression de nombreuses pollutions. Chez nous, l'échec de la mise en place d'un tri sélectif à la source a eu deux effets qui ont pesé très lourd sur la gestion des CET. Le premier est d'ordre financier car la non valorisation des déchets (recyclage, réutilisation, compostage, production d'énergie par la biomasse...) aggrave les déficits publics et limite l'autonomie pour des initiatives propres. Le deuxième est la saturation avant terme des CET du fait que ce ne sont plus les déchets ultimes qui sont entreposés mais la quasi-totalité des quantités générées par les ménages. Cette pression oblige les pouvoirs publics à rechercher de nouvelles assiettes foncières pour l'implantation de nouveaux sites mais aussi à faire face à des problèmes accrus d'acheminements vers les centres (transport). D'autres conséquences de l'absence de tri, comme la décomposition des déchets organiques mis dans les décharges (au lieu du compostage ou la production de biogaz) qui génèrent des quantités importantes de léxiviats polluants ainsi les sols et l'eau mais aussi responsables des nuisances olfactives très incommodantes. Incinération, performances énergétiques et tri sélectif De nombreux pays utilisent de plus en plus l'incinération, qui n'est plus seulement un moyen d'élimination des déchets mais aussi un mode de valorisation important (production de fuel et d'électricité). L'autre avantage est la suppression de la pression sur le foncier car on ne met en décharge que ce qui n'est pas brulé. Ces restes et les cendres sont récupérés et utilisés dans le revêtement des routes (bitumage) ou alors mis dans des décharges. L'élimination des pollutions visuelles en est un autre gain. La collecte sélective des déchets ménagers a peu d'influence sur le pouvoir calorifique des déchets introduits dans l'incinérateur. Seul le plastic qui a un fort pouvoir calorifique influence sensiblement l'opération. Toutefois, la récupération, grâce à un tri sélectif, de matériaux pour la réutilisation ou la production de matières premières secondaires (verre, aluminium, métaux...) constitue non seulement une source de revenus appréciable mais elle diminue aussi la pression sur l'extraction des ressources naturelles ou leur importation. Pour le reste, 70% des déchets ménagers sont combustibles (papiers, cartons, déchets putrescibles, textiles, plastiques...). De plus, des secteurs d'activité comme l'industrie (résidus d'hydrocarbures, goudrons, solvants usagés, scieries, huileries ...) ou l'agriculture (paille de blé, de maïs...) et les déchets agro-industriels (provenant surtout des sucreries et des huileries) sont aussi pourvoyeurs de déchets au fort potentiel calorifique. En moyenne, 7 tonnes de déchets produisent 1 tonne de fuel par l'incinération. Enfin, deux types d'énergie sont produits dans une usine d'incinération, la chaleur et l'électricité. Dans l'Union Européenne, les calculs tablent sur la possibilité d'alimenter 17 millions de ménages en électricité et 24 millions en chauffage. Reste que les fumées d'incinération des déchets sont très toxiques. Pour cela les normes de pollution atmosphérique des centrales sont naturellement très sévères. Devant les difficultés croissantes de l'élimination des déchets urbains dans les grandes agglomérations du pays, les pouvoirs publics ne peuvent se détourner d'une solution qui pourrait venir en partie de l'incinération. Par contre, au vue de l'expérience dans ce domaine et dans d'autres secteurs aussi, ils doi vent certainement se garder de généraliser cette pratique à l'ensemble du pays à partir d'une décision centrale. Les études et l'élaboration de plans régionaux sont plus à même de déterminer les méthodes à investir et les moyens à mettre en œuvre dans chacune des régions. La taille des villes, le potentiel industriel, la production agricole et les vocations sont parmi les facteurs qui peuvent faire la différence dans les approches. R. S.