Accusé de mauvaise volonté politique, le gouvernement malien s'est enfin décidé à donner un coup d'accélérateur à la mise en œuvre de l'accord de paix. La pression d'Alger et de la communauté internationale y sont pour beaucoup. Les Maliens ont franchi ce week-end une nouvelle étape dans le processus de réconciliation, parrainé par l'ONU, en signant une déclaration qui fixe les priorités et objectifs à atteindre sur le court et moyen terme. La Plateforme d'Alger (pro-Bamako), la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA, ex-rebelles) et le gouvernement ont réussi, en effet, à se mettre d'accord sur un calendrier des actions à mener, après huit jours d'échanges dans la capitale malienne. Les signataires de l'accord d'Alger ont convenu de l'"organisation du forum pour la paix et la réconciliation au Mali, à Kidal, du 27 au 30 mars 2016, qui clôture le processus d'Anéfis" qui a obligé les membres de la Plateforme à retirer leurs forces de la région, après plusieurs jours de présence illégale. Acculés par une situation sécuritaire, qui s'est fortement dégradée ces derniers mois à travers tout le pays, y compris à Bamako, les parties en conflit tentent aujourd'hui de rattraper le temps perdu et de faire face, en commun, au retour des groupes terroristes, dont Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Ansar Eddine du chef targui Iyad Ag Ghali et le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Ainsi, il est prévu dans la déclaration rendue publique hier la "mise en place d'un dispositif de sécurité commun pour contribuer à la protection des personnes et des biens et la libre circulation des personnes dans le pays". Cela se fera parallèlement à la "concrétisation urgente du cantonnement des combattants à travers le processus de DDR (désarmement, démobilisation et réintégration)", une des phases les plus délicates qui nécessitent du temps et une étroite collaboration de tous les acteurs de la crise malienne et de la médiation internationale. Mais en attendant l'entame du processus de DDR, les représentants des délégations qui se sont rencontrés à Bamako ont adopté un "chronogramme sur 2 mois (mars-avril 2016) de mise en œuvre des activités garantissant la sécurité publique et l'instauration d'une vie sociale normale sur tout le territoire à travers (...) la mise en place des autorités intérimaires et l'accélération de la mise en œuvre des différentes dispositions de l'accord par l'adoption des textes y afférents de préparer les élections". Pour rappel, les discussions et la mise en œuvre de l'accord de paix, qui a été signé en deux sessions à Bamako, le 15 mai et le 20 juin 2015, ont été freinées par ces questions liées à la gestion de la phase intérimaire jusqu'à la tenue de nouvelles élections législatives et régionales, principalement conditionnée par le retour des réfugiés maliens dispersés entre le Niger, le Burkina Faso et la Mauritanie. Toutefois, ce coup d'accélérateur est surtout motivé par le danger du retour en force d'Aqmi, d'Ansar Eddine et du Mujao, qui ont ouvertement affirmé leur intention de saper les efforts de paix, à travers l'organisation de plusieurs attentats meurtriers contre des étrangers à Sévaré et Bamako. Les forces onusiennes de maintien de la paix constituent une cible privilégiée des groupes terroristes, fortement déstabilisés par la réconciliation scellée entre leurs anciens alliés parmi les mouvements signataires de l'accord d'Alger. Lyès Menacer