Poutine s'est félicité de la présidentielle kirghize dont Bakiev, qui a exercé l'intérim, a empêché le chaos auquel conduisait la fuite d'Akaïev, un dictateur soutenu par le Kremlin depuis la fin de l'ex-Union soviétique. Le président russe estime qu'un Kirghizstan stabilisé jouera un rôle déterminant dans l'Asie centrale, objet de tous les dangers avec, en filigrane, une sérieuse menace islamiste. Bakiev, un candidat de compromis entre les intérêts russes et les exigences démocratiques qui soufflent dans la région depuis la révolution géorgienne, s'était engagé à remplir ce deal. Même satisfaction chez les Occidentaux qui ont jugé l'élection conforme aux normes internationales. L'Asie centrale fait l'objet d'une rude compétition entre les Russes et les Américains. Ces derniers ont même planté leur drapeau en Ouzbékistan et au Kirghizstan, à la faveur de la guerre contre le califat des Talibans en Afghanistan, en contrepartie de soutiens financiers, mais au grand dam de Poutine qui a vu d'un mauvais œil l'influence croissante des Etats-Unis dans la région. Washington n'est d'ailleurs pas du tout étranger au vent de démocratie qui souffle aux portes de Moscou. Les pouvoirs totalitaires de Géorgie, de l'Ukraine et du Kirghizstan sont tombés grâce à des scénarios mis au point et financés par des ONG américaines. Poutine était parvenu à faire converger les pays membres de l'organisation de coopération de Shanghai (OSC) autour de ses efforts pour le retrait des bases américaines dans ce qu'il considère comme la profondeur stratégique de la Russie. La Russie, la Chine et des pays d'Asie centrale s'étaient prononcés contre la présence américaine, menaçant de lui opposer une sorte d'anti-Otan. Ces pays avaient solennellement déclaré qu'ils entendaient être maîtres à bord chez eux, dénonçant l'activisme américain qui, à leurs yeux, ne vise qu'à asseoir le monopole des Etats-Unis dans les affaires internationales. Outre cet aspect géostratégique, l'Asie centrale est aussi le principal gisement d'approvisionnement en pétrole et gaz pour les économies occidentales mais aussi de pays émergeants voisins, comme la Chine et l'Inde. Mais, avec les attentats terroristes de Londres, la revendication sera certainement mise sous le boisseau, étant entendu que la lutte contre l'islamisme radical est redevenue la priorité des priorités, y compris pour les pays de l'OCS. D. Bouatta