L'infatigable militant des droits de l'Homme et de la démocratie, Me Ali Yahia Abdenour, a appelé, hier, depuis Sidi Aïch, tous les habitants de la Kabylie à célébrer, cette année, le 36e anniversaire des événements d'avril 1980, dans l'union et la fraternité. "Il faut s'unir, se rassembler et se mobiliser", a-t-il martelé plusieurs fois, sous les ovations d'un public nombreux, venu assister à la conférence-débat qu'il a animée, hier après-midi, à la salle de cinéma Youcef-Abdjaoui de la ville. Invité par l'association culturelle Eco-Soummam de Sidi Aïch, l'ancien président de la première Ligue algérienne pour la défense des droits de l'Homme (Laddh) est longuement revenu sur le long cheminement du combat identitaire en Algérie, en remontant à la crise berbériste de 1949, à laquelle il a d'ailleurs consacré un livre. Après avoir expliqué l'origine de la crise berbériste de 1949, née au sein de l'instance dirigeante du PPA-MTLD, le conférencier rappellera certains événements phares ayant marqué son parcours militant, long de plus de 60 ans. "Je me souviens comme aujourd'hui, lorsque nous sommes venus ici à Sidi Aiïch, à pied, depuis Tizi Ouzou. C'était en 1948, à la veille des élections du 4 avril, organisées à l'époque par l'administration coloniale. Le PPA (clandestin) était le parti le plus ancré en Kabylie, où la population avait décidé de boycotter ces élections. Ce qui avait poussé Messali Hadj à créer dans la précipitation le MTLD en vue de participer à ces joutes électorales", témoigne l'orateur, du haut de ses 95 ans. Evoquant le sort réservé aux militants berbéristes activant au sein du PPA, à l'image de Bennaï Ouali et d'Ould Hamouda, le conférencier affirmera que même le défunt Hocine Aït Ahmed n'a pu échapper à la purge de l'époque, puisqu'il a fini par être éjecté de la direction nationale du parti que dirigeait Messali, pour la simple raison d'"être Kabyle". Autrement dit, il était soupçonné d'être de mèche avec les autres militants berbéristes qui tenaient la dragée haute aux partisans de l'Algérie arabo-musulmane, a-t-il soutenu. Revenant à la période post-indépendance, Me Ali Yahia déplorera que "le pouvoir a été pris de force par l'armée des frontières dès 1962. C'est vraiment malheureux de constater cette triste réalité. La Révolution n'a finalement pas appartenu à ceux qui l'ont déclenchée !". L'orateur refuse d'adhérer à cette thèse donnant l'ANP comme "une digne héritière" de la glorieuse ALN. Car, selon lui, "cette dernière est née dans les maquis pour combattre le colonisateur français, tandis que la première vit dans des villas, nomme les présidents et les ministres...". Pour lui, l'Armée populaire digne de ce nom doit servir le peuple et la nation, et non pas un pouvoir. Interrogé sur le phénomène de la corruption qui ne cesse de gangrener l'économie nationale, Me Ali Yahia ironisera : "Il n'y a pas que Chakib Khelil, mais 30 000 corrompus en Algérie." Et d'ajouter : "Le président de la République est le premier responsable de la situation, étant donné que l'appareil judiciaire est entre les mains de ses hommes, dont l'actuel ministre de la Justice, Tayeb Louh." KAMAL OUHNIA