Eprouvantes ont été les deux minutes durant lesquelles le ministre de l'Industrie et des Mines, Abdeslam Bouchouareb, a pris la parole pour intervenir, hier, à l'ouverture du 3e Forum algéro-français, à l'hôtel El-Aurassi, à Alger. Eprouvantes en ce sens que le ministre a eu beaucoup de peine à faire sa brève déclaration, pourtant transcrite et soigneusement posée sous ses yeux. Les regards étaient tous braqués sur celui qui vient d'être cité dans le scandale planétaire d'évasion fiscale Panama Papers, et un silence gênant régnait dans la salle. Visiblement confus, la voix éteinte, Abdeslam Bouchouareb avait du mal à formuler les mots avec la même assurance qu'il affichait habituellement en pareille circonstance. Assis à côté de son Premier ministre, Abdelmalek Sellal, les yeux plongés dans des feuilles tremblant entre ses mains, Abdeslam Bouchouareb bégayait par moment. Pendant ce temps, le Premier ministre français, Manuel Valls, et son ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, assis à côté de leurs homologues algériens, échangeaient des propos avec un léger sourire en coin. Le supplice fut tel qu'Abdeslam Bouchouareb a lu dans sa copie : "Sans aussi souvent se donner les moyens...", avant de se rattraper, quoique péniblement, pour corriger et relire : "C'est aussi souvent se donner les moyens de dépasser des différends qui vous paraîtront aujourd'hui insurmontables." Insurmontable, l'effort de lecture l'a été, justement, pour le ministre, à tel point qu'il s'est précipité à inviter, "sans plus tarder", dit-il, les deux Premiers ministres à signer les accords de partenariat à l'ordre du jour. Mais, Abdelmalek Sellal a vite fait de le reprendre, lui signifiant qu'il avait encore matière à lire dans sa copie. Seconde épreuve laborieuse pour Abdeslam Bouchouareb qui venait d'oublier d'annoncer le report de la signature de certains projets de partenariat, à l'exemple de celui de l'implantation d'usine Peugeot-Citroën en Algérie. Peut-être était-ce trop difficile à dire ? C'est ainsi qu'il parlera, manifestement perturbé, d'"entre quatre et cinq projets en cours de maturation", ne pouvant pas, vraisemblablement, préciser s'il s'agissait de quatre ou de cinq projets à finaliser. Décidément, l'effet des Panama Papers ne s'est pas encore dissipé. Mehdi Mehenni