La baisse des importations a entraîné des tensions sur le marché du ciment. Elle en importe annuellement 2,5 à 3 millions de tonnes, soit 35% de ses besoins. Ces volumes pourraient augmenter davantage, la consommation annuelle évoluant en moyenne de 7%. Aujourd'hui, le rythme des activités de construction est tel que la demande en matériaux de construction, dépasse l'offre. Dans le cadre des nouvelles mesures prises par le gouvernement pour "réorganiser le commerce extérieur", des restrictions ont été imposées à l'importation du rond à béton, du ciment mais aussi de véhicules. Le contingentement des matériaux de construction est un dispositif "mal réfléchi", juge le président d'Algérie conseil expert (Ace). La quantité de ciment autorisée à l'importation pour 2016 a été fixée à 1,5 million de tonnes. Quant au contingent quantitatif du rond à béton, il l'a été à 2 millions de tonnes pour l'année 2016. Cela n'est pas sans conséquences sur la consommation en ciment et en rond à béton. En effet, la baisse des importations a provoqué une tension sur le marché, où le prix du sac de ciment, par exemple, a doublé, sachant qu'en même temps, d'énormes chantiers de construction sont déjà engagés et d'autres programmés, ainsi que l'explique Smaïl Lalmas, président d'Algérie conseil expert (Ace). Ne sont-ce pas là les premiers effets de l'introduction des licences d'importation qui continuent de faire débat ? Le président d'Ace rappelle que par le passé, nous avions connu la pratique des licences d'importation, avant la libération du commerce extérieur. Les licences d'importation avaient été souvent, selon lui, attribuées dans des conditions "pas du tout transparentes" et avaient permis à certains importateurs privilégiés de se retrouver en "situation de monopole et de faire fortune". Aujourd'hui, dit-il, le retour aux licences d'importation suscite, tant au niveau des opérateurs locaux qu'étrangers des "signes d'inquiétude" et "du retour à l'économie administrée" des années passées. Le gouvernement a décidé d'appliquer ce dispositif de licence à trois produits : le ciment, le rond à béton et les véhicules. Il devait entrer en vigueur début 2016. Le choix de ces produits repose, souligne Smaïl Lalmpas, sur le "poids" qu'ils représentent dans les importations, selon les appréciations "des responsables concernés par l'opération". Or, note-t-il, nous savons bien que les trois produits réunis ne dépassent pas "les 5,5 à 6 milliards de dollars", et que toute cette gymnastique est faite pour économiser "deux à trois milliards de dollars", alors qu'on s'attend à un déficit record de la balance commercial pour 2016, qui avoisinera "les 30 milliards de dollars". Le président d'Ace estime dans le même ordre d'idées que l'opération de contingentement va engendrer une multitude de problèmes : "interruption et arrêt de certains chantiers pour non-disponibilité de ciment et de rond à béton, produits essentiels dans le domaine de la construction, livraison de projets en retard et augmentations des prix sur le marché noir de ces produits..." Les importations de matériaux de construction, dont le ciment, le fer et l'acier, la céramique et le bois, ont chuté, en valeur, de plus d'un tiers au premier trimestre 2015 pour atteindre 664,8 millions de dollars, contre 995,1 millions de dollars il y a un an. La quantité des principaux matériaux de construction importés s'est également contractée sur la même période, affichant une baisse de 12% et s'établissant à 2,2 millions de tonnes. En revanche, les capacités de production n'arrivent toujours pas à se développer et à suivre le rythme des chantiers lancés dans le btph. Ainsi, la capacité de production de ciment, par exemple, se situait autour de 21 millions de tonnes par an, en 2014. Il en faut cinq millions de tonnes supplémentaires pour satisfaire la demande. Il y a toutefois cette volonté exprimée par le gouvernement d'accroître les capacités de production du pays. L'objectif poursuivi par l'exécutif était de voir 85% des projets de construction en Algérie utiliser des matériaux de construction produits localement, un taux qui se situe à l'heure actuelle à 65%. Y. S.