Le jeu trouble des autorités de Bamako freine depuis des mois la mise en œuvre de l'accord pour la paix et la réconciliation au Mali, mettant ainsi en péril tous les efforts consentis par la médiation internationale depuis le début de la crise malienne fin 2012. Rien ne va plus entre les signataires de l'Accord d'Alger et les membres de la médiation internationales qui se sont quittés, mardi à Bamako, avec de graves divergences, à l'issue de la huitième session du comité de suivi de l'Accord d'Alger (CSA). Les discussions se sont, en fait, bloquées au sujet de la mise en place des autorités intérimaires et des patrouilles mixtes, deux points qui constituent un passage obligé par les Maliens et la médiation internationale pour achever le processus de paix parrainé par l'Onu. Pour Bamako, il faut d'abord former les patrouilles mixtes pour le rétablissement de la sécurité dans le nord du Mali, ce qui constitue une préoccupation légitime pour les autorités maliennes. Mais pour la Coordination des mouvements de l'Azawad (CMA, ex-rebelles) et la Plateforme d'Alger (pro-gouvernement), l'urgence réside dans la mise en place des autorités intérimaires qui permettront un retour à une vie normale dans le nord du pays et ouvriront aussi la voie au retour des populations déplacées par la rébellion en 2012. En effet, chacun sa priorité, mais depuis quelques mois c'est le gouvernement du président Ibrahim Boubacar Keïta qui est montré du doigt pour son manque de volonté politique à remplir sa part du contrat. Car, les députés ont voté à l'unanimité la loi sur les autorités intérimaires, dont le rôle sera, en outre, la préparation des prochaines élections locales dans le nord du Mali. Cette loi attend toujours d'être promulguée. Mais il semblerait que Bamako disposerait d'un autre agenda, alors que la situation sécuritaire au Mali prête à beaucoup d'inquiètude ."Aujourd'hui, le plus grand blocage se situe au niveau de la mise en place des autorités intérimaires et au niveau de l'opérationnalisation du MOC, le mécanisme opérationnel conjoint. Pour nous, aujourd'hui la période intérimaire constitue le premier pas dans le cadre de la mise en œuvre de l'accord. Parce que vous voyez la période intérimaire doit suivre juste après la signature de l'accord. Si juste aujourd'hui cette question n'est pas traitée et qu'on veut sauter à d'autres questions. Ça voudra dire qu'on veut mettre la charrue avant les bœufs", a dénoncé un des porte-parole de la CMA, Almou Ag Mohamed aux médias locaux. De son côté, le patron de la mission onusienne de maintien de la paix (Minusma), Mohamed Anadif, reconnaît lui aussi que les blocages sont sérieux, évitant toutefois de désigner un coupable. "Les défis restent nombreux. J'espère que la prochaine session se tiendra dans une atmosphère de pleine confiance et que les obstacles soient levés particulièrement à cette question qui revient à chaque fois dans les débats, celle des autorités intérimaires et celle de l'opérationnalisation du Moc", a-t-il déclaré, révélant à demi-mot que le climat de méfiance entre les signataires de l'accord d'Alger, un an après sa conclusion au forceps. Lyès Menacer