Au lieu que ce rendez-vous soit une rencontre bilan pour évaluer ce qui a été fait, où s'inquiéter sur le cycle d'effondrement de douerate, il n'est rien d'autre qu'un folklore, voire une opportunité pour une dégustation lors d'une pause-café. Le patrimoine ? On n'en parle durant un mois aussi rond qu'une "qoba" du mausolée du saint Sidi Abderrahmane, sans qu'il y ait le soupçon d'une volonté hardie pour changer les choses ! S'il fallait une preuve qui corrobore ce gâchis, celle-ci est étayée par les étais qui soutiennent le palais de Djenane Lakhadar d'El Madania et au-dessus desquels, il n'y a aucun ouvrier : "Comme vous avez pu le constater lors de votre visite au début de l'année, le chantier est toujours à l'arrêt" a-t-on su de Boughadou Malek, le vice-président chargé de l'urbanisme et du service technique auprès de la mairie d'El Madania. C'est dire que la mise en valeur de ce fleuron édifié au milieu du fleuron de l'ancien centre aéré Frédéric-Lang de l'ancien Clos Salembier, n'a pas verdi d'un iota depuis l'article "Le chantier du palais de Djenane Lakhdar à l'arrêt" publié dans Liberté du 24 janvier 2016. Donc, autant souscrire à l'idée que ce mois du patrimoine recèle, en ses vestiges, tant de similitudes avec la Journée nationale de La Casbah qui coïncide chaque année avec le 23 février. Et, au lieu qu'elle soit une rencontre dite bilan pour évaluer ce qui a été fait ou s'inquiéter sur ce qu'il reste à faire, la Journée de La Casbah a, au contraire l'aspect d'un rendez-vous... convivial, pour arpenter les "z'niqat" dépavées de La Casbah. De la sorte, la Journée de La Casbah n'est rien d'autre que du folklore, voire une opportunité de "bousboussate" (embrassades), qu'à l'envie d'arrêter l'effrayant cycle d'effondrement de douerate. Du reste, on se plaît à feuilleter l'album de nos merveilles patrimoniales, sans qu'il y ait le moindre geste salvateur envers Djamâa El Barani sis à flanc de Dar Essoltane sur l'avenue Taleb-Abderrahmane à Bab Edjedid et qu'est à présent tout hérissé d'étais : "Les travaux d'urgence pour la pose d'étais s'entend, sont arrivés à terme, donc en voie de réception. S'agissant des travaux de confortement, les modalités du choix de l'opérateur et de l'ouverture du chantier obéissent à la lenteur des dispositions du code des marchés publics, en dépit de l'urgence et de la spécificité des travaux liés à un ouvrage digne de durer dans le temps" a déclaré l'archéologue Benlounes Omar, qu'est chargé de sauvegarder, ce qu'il y a sauver de ce fleuron cultuel. Décodées, les choses sont restées en l'état depuis notre article intitulée "SOS : une mosquée en péril" publiée dans l'édition du 21 janvier. Au demeurant, les autorités ne se soucient guère de l'état des lieux de notre patrimoine ! Pas même ceux qui peuvent apporter leur pierre à l'édifice Casbah, mais qui se plaisent seulement à l'échange de cartes de visites lors des retrouvailles que permet la Journée nationale de La Casbah, dans le cercle restreint d'anciens ouled el houma, venus si nombreux aux nouvelles, histoire de se rencontrer pour une dégustation lors d'une pause-café à l'ancienne galerie artistique, le Malakoff, rue du vieux palais de l'îlot de Zoudj-aïoune. C'est dire le mérite du mouvement associatif que d'attirer du beau monde, mais qui se disperse dès le lendemain du rituel. Et depuis, il n'y a plus foule au-delà des "z'niqat" Malaïka-Benaïssa (ex-Caton), Sidi-Abdellah ainsi qu'à la venelle Brahim-Fateh où ruisselle la fontaine d'Ali-Medfâa et qui sont perpendiculaires à la rue Amara-Ali (Randon). D'autre part, seul l'essaim de fins gourmets continue de s'agglutiner autour de la poêle du tabbakh qui proposent de la kebda m'charmla. Sinon et pour le reste, l'état des murs décrépi de l'ancien café Maroc, rue Mustapha-Latreche dicte au visiteur de détaler au plus vite, puisqu'il y a le risque latent d'un effondrement. Autant dire que le péril est au coin de toutes les z'niqat, notamment au sabat (voûtain) Abencerage, où l'écheveau d'étais augure du pire. Et comme si le lot d'éboulis ne suffisait pas au malheur des Casbadjis, voilà que la culture de l'oubli s'en mêle et efface la plaque commémorative rivée au fronton des vestiges de la douera 9, rue de Thèbes, en hommage aux victimes de l'abject attentat qu'avaient perpétrés toute honte bue, les Ultras en ce funeste soir du 10 août 1956. Poursuivant notre exploration, nous arrivons rue Boudriès Père et fils, où la fermeture de l'unique boulangerie et du local des boy scouts augure du pire. Et même, si Taht scout n'a pas eu le temps de narrer la bravoure des anciens du mouvement national, l'aïn Bir Djebah, abreuve de plus belle les passants et les touristes si nombreux sur l'ancienne rue des Janissaires qu'est contiguë à taht essour (sous le rempart), où ma mani Keltouma avait sa douera. En ce lieu-ci, où se conte l'épopée de l'héroïque Zone historique autonome d'Alger, l'îlot de la zaouïa du saint Sidi-Amar ne tient qu'aux étais. Autre étape, houanet la ghariba ou les boutiques de l'étrangère, où il ne reste nul vestige pour y conter l'hôtel à Fifi. Qu'est-il arrivé à "Casbah mienne" si ce n'est que le maçon s'est emmêlé les outils et depuis, le darbouz du foqani de mani Keltouma a été remplacé par une hideuse murette en briques. Authentique ! Le cas est d'autant réel où la rampe de la douera de mon guide Houas-Saïd rue Oufchoune-Mustapha (ex-Ghariba) a connu le même sort, lors de la prétendue opération de confortement des douerate. C'est dire qu'on est loin d'une restauration à l'identique que nos maçons ne maîtrisent pas. Dommage, car à l'usure du temps, s'est ajouté l'affront de l'homme ! C'est tout cela le patrimoine qui tient beaucoup plus du folklore que d'une gestion rationnelle d'une richesse qui appartient à tous les Algériens. Louhal Nourreddine