Depuis deux jours, Tizi Ouzou vit au rythme des émeutes suite à l'empêchement par les services de police d'un meeting populaire dans le quartier des Genêts, et d'un rassemblement populaire au rond-point du centre-ville, près de l'ex-brigade de gendarmerie. Les deux manifestations ont été organisées par les délégués de la Coordination des quartiers et villages de la commune de Tizi Ouzou, en solidarité avec les détenus du mouvement citoyen qui sont en grève de la faim depuis le 3 décembre dernier. Les revendications portent sur la libération immédiate et inconditionnelle de ces otages politiques du pouvoir. La ténacité des délégués à tenir le meeting mercredi, puis un rassemblement le lendemain, n'a pas été suffisante face au véritable arsenal antiémeutes mis en place par la police. Jeudi, c'était un rassemblement populaire devant l'ex-brigade de gendarmerie qui a été violemment réprimé. Prévu à 13h, les CNS sont intervenus dix minutes après le début du regroupement, avec un chasse-neige, en tirant des bombes de gaz lacrymogènes sur la foule qui n'était pas encore dispersée. Comme la veille, plusieurs interpellations ont été enregistrées et des blessés recensés. Un jeune de 13 ans a été blessé par une balle en caoutchouc au niveau de la tête. Par ailleurs, deux policiers en civil ont été lynchés par des jeunes manifestants qui les ont pourchassés jusque dans l'enceinte de l'hôpital. Les affrontements ont gagné plusieurs foyers de la ville de Tizi Ouzou : rue Abane-Ramdane, Lamali jusqu'au deuxième rond-point de la ville (devant FFC), et ne se sont arrêtés que tard dans la soirée de jeudi. La veille, peu avant le début de la première manifestation, les CNS sont intervenus pendant la minute de silence pour disperser une foule venue nombreuse assister à la rencontre. Deux engins antiémeutes, des Nissan de la BMPJ et d'autres véhicules de la police ont sillonné le quartier des Genêts. Ils ont déchiré toutes les photos de journaux et le portrait de l'enfant du quartier, Belaïd Abrika, les posters des martyrs du Printemps noir, et essayé de saccager une cafétéria appartenant à l'un des délégués actifs du même quartier. Mais ils ont été refoulés par les jeunes manifestants, qui ont été nombreux à riposter par les jets de pierres, de cocktails Molotov et autres projectiles lancés des balcons, à l'instar d'une cuvette de toilette anglaise. Une fois les CNS partis, les délégués se sont mobilisés de nouveau et la population s'est regroupée spontanément et de manière spectaculaire sur la route séparant l'hôpital du quartier populaire, et le meeting a repris avec une foule plus dense. Dda Boussaâd et Amar Amazigh ont pris la parole pour exiger la libération des détenus qui sont à leur 25e jour de grève de la faim. Une seconde fois, les CNS ont fait irruption pour réprimer le meeting. Les affrontements ont repris pour se poursuivre jusqu'à la fin de la soirée, faisant un blessé par balle en caoutchouc. K. S.