Se rendant compte que la Turquie était la grande perdante dans les différends qui l'opposent à la Russie et à Israël, Recep Tayyip Erdogan n'hésite pas à se déjuger en présentant à la première des excuses officielles et en acceptant de normaliser ses relations avec la seconde. Ainsi, il fait un pas pour renouer avec les anciens alliés majeurs de la Turquie, qu'ont été Moscou et Tel-Aviv et avec lesquels elle était brouillée. Pour sortir de l'isolement croissant dans lequel Ankara s'était plongée en rompant avec l'Etat hébreu et en provoquant la colère de Vladimir Poutine après avoir abattu un avion de chasse russe à la frontière avec la Syrie, Erdogan fait des concessions de taille. Il faut croire qu'il n'avait plus le choix que de plier face aux Russes et aux Israéliens dans l'espoir de récupérer leurs millions de touristes, qui rentabilisent ses infrastructures touristiques. Il est même question que la Turquie verse "si nécessaire" des compensations à la Russie pour l'avion russe abattu par la chasse turque en novembre 2015. Les choses seront plus claires demain après la discussion du président turc avec Vladimir Poutine, lequel a souligné que "la normalisation" des relations entre les deux pays prendra du temps. Pis, afin de s'assurer à nouveau le soutien d'Israël, Ankara n'évoque plus la question de la levée du blocus imposé aux Palestiniens de Gaza, dont Erdogan avait fait son cheval de bataille depuis 2010, alors que le SG de l'ONU a dénoncé cette situation, qu'il a qualifiée de "punition collective alimentant l'escalade" des violences. Ceci dit, il ne pouvait faire infléchir le Premier ministre Benjamin Netanyahu, qui a affirmé que ce blocus resterait en vigueur, car "c'est un intérêt sécuritaire de haute importance pour nous. Je n'étais pas prêt à le renégocier". Il semblerait que cette inflexion de la diplomatie turque est inspirée par le nouveau Premier ministre Binali Yildirim, après les dégâts provoqués, selon les analystes, par son prédécesseur Ahmet Davutoglu. Merzak Tigrine