Les pouvoirs publics réalisent tout dans la précipitation, mettant ainsi en danger des centaines de milliers de personnes en cas d'avènement de l'une de ces catastrophes comme celles des inondations de Bab El-Oued, du séisme de Boumerdès et de Chlef, des explosions gazières de Skikda, d'Arzew... L'Algérie n'est toujours pas dotée d'une véritable stratégie de prévention des risques majeurs. Pourtant, en décembre 2004, une commission pluridisciplinaire composée d'une centaine d'experts nationaux a élaboré une loi sur les catastrophes naturelles, des risques majeurs et du développement durable. "Malheureusement, aujourd'hui, nous assistons à une cacophonie et à et un non-respect criant de l'ensemble des articles de cette loi", déplore le Pr Chelghoum Abdelkrim. Dans ce texte, il est demandé l'élaboration d'une cartographie détaillée pour chaque risque dans les communes et les wilayas. De cette procédure, il en découlerait toutes les études préalables relatives à une stratégie fiable en matière de prévention et de réduction de ces risques majeurs au nombre de 10 identifiés en Algérie sur les 14 classés de par le monde. Il s'agit "des études d'impact sur l'environnement, des études de danger, respect des principes de base liés à la prudence, la précaution, la concomitance, la participation et ce, avant l'implantation de n'importe quel projet d'infrastructure", explique le Pr Chelghoum, qui dénonce les constructions importantes édifiées "dans les lits d'oued, sur des terrains liquéfiables, et des lâchers sans aucune étude sérieuse sur les plans géologique et géotechnique". Les pouvoirs publics réalisent tout dans la précipitation, mettant ainsi en danger des centaines de milliers de personnes en cas d'avènement de l'une de ces catastrophes comme celles des inondations de Bab El-Oued, du séisme de Boumerdès et de Chlef, des explosions gazières de Skikda, d'Arzew... "Dans la gestion des grands projets, l'on navigue à vue. C'est le cas de la Grande mosquée, construite sur le lit majeur de oued El-Harrach", relève l'expert, citant, également, l'autoroute Est-Oued laquelle, selon lui, "s'effondre sur presque la totalité de son tracé dont le tunnel de Djebel El-Ouahch près de Constantine. Un effondrement qui est entré au Guinness Book des records". Les engagements irréfléchis de l'Etat dans des projets se poursuivent avec l'édification du port du centre entre Cherchell et Tipasa. Censée remplacer le port d'Alger dans le transport de marchandise, cette infrastructure, appelée à devenir un hub pour l'Afrique, est projetée "sans justification technique ou scientifique, sans étude d'impact sur l'environnement, ni aucune quantification des risques encourus par la région", regrette encore Abdelkrim Chelghoum. La décision a été prise sur la base d'une appréciation "pifométrique" en collaboration avec des Chinois et des Sud-Coréens seulement. "Les experts nationaux ont été systématiquement marginalisés et éliminés de la commission. Pour quelles raisons ?", s'interroge le Pr Chelghoum. "À mon avis, la construction d'un projet aussi colossal va engendrer à l'avenir une série de risques difficilement quantifiables et ce sera toujours le Trésor public qui paiera les conséquences", alerte-t-il. En matière de gestion des risques majeurs, notre pays se trouve, estime-t-il, à la traîne des nations notamment des voisins, tels que le Maroc qui applique une stratégie de prévention digne de ce nom. B. K.