Nous avions demandé au gouvernement de nommer un ‘‘Monsieur risques majeurs'' au niveau de toutes les wilayas du pays. C'est une urgence. Nous avions réitéré la requête à maintes reprises, mais rien n'a encore été fait dans ce sens», a déclaré, avant-hier à Boumerdès, le Pr Abdelkrim Chelghoum, directeur de recherche, expert en numérique et génie parasismique, président du Club des risques majeurs. Invité par les journalistes de la wilaya, M. Chelghoum a dressé un constat alarmant sur l'anarchie constatée en matière d'urbanisme et les incohérences de la stratégie de prévention des risques de catastrophes naturelles. Selon lui, «80% des constructions érigées après le séisme de 2003 l'ont été sur des terrains non constructibles, souvent sur les lits et les abords des oueds, ou encore sur des failles sismiques et des terrains liquéfiables», a-t-il relevé. Pour étayer ses propos, il a cité le cas des promotions immobilières construites avec l'aval des services d'urbanisme au bord des oueds à Chéraga, Sidi Abdellah, Bouira, Boumerdès, etc. «A Bouhinan, on a construit sur une faille sismique», s'étonne-t-il. Même les grands projets structurants ne sont, selon lui, pas épargnés par ce problème. «Sur l'autoroute Est-Ouest, il n'y a pas une étude correcte des sols, ce qui explique les anomalies constatées sur la chaussée. Tous les 20 km il y a des points noirs, des nids-de-poule ou des effondrements, comme c'est le cas au niveau du tunnel de Djebel El Ouahch. Ce tunnel s'est effondré sans séisme, ceci est inacceptable et choquant. Même chose pour le projet de la grande mosquée d'Alger où c'est l'entreprise chinoise qui construit et qui est chargée des études et du suivi. Ce qui est contraire au code des marchés et à toutes les lois», a-t-il dénoncé. Pour lui, «quand le sol est mauvais, on n'a aucune chance de survivre à un tremblement de terre de forte intensité. Mais quand le sol est bon, on a 70% de chances d'y échapper à 70%». Le conférencier souligne qu'«on ne peut pas faire de la politique avec les seismes». «Le séisme est un phénomène récurrent, non prévisible et non négociable», a-t-il rappelé avant de critiquer vertement le ministère de l'Habitat. «Il y a un problème au niveau de ce département. Le ministre ne doit pas s'occuper seulement des statistiques de l'AADL, mais il doit se soucier aussi de la gestion des villes et de l'urbanisme», a-t-il plaidé. M. Chelgoum trouve anormal que «la conformité des constructions soit réduite à un papier administratif». «Pour le gouvernement, la conformité c'est un dessin d'esquisse. Or, il faut d'abord prouver la conformité de la structure et du sol», a-t-il suggéré en demandant d'impliquer les experts et des bureaux d'études dans ce travail.