Outre le déplacement de ministres, des vagues de visiteurs ne cessaient d'affluer tout au long de la journée d'hier vers ce lieu historique, alors que plusieurs partis politiques y ont dépêché leurs délégations respectives. Il y avait foule hier au village Ifri, dans la commune d'Ouzellaguen, à l'occasion de la commémoration du 60e anniversaire du Congrès de la Soummam. Le site abritant un musée dédié à l'histoire de la guerre de Libération (1954-1962) et un mémorial érigé à la mémoire des martyrs de la Révolution est devenu, l'espace d'une journée, un véritable lieu de pèlerinage. En effet, ce sont des milliers de personnes, venues de différentes régions du pays, qui se sont déplacées, hier, vers ce lieu hautement historique qui abrita, un certain 20 Août 1956, les travaux du premier congrès du FLN qui reste un événement majeur, voire une étape charnière pour la guerre de Libération nationale. Il faut dire qu'au-delà du fait que l'événement a été célébré, comme à l'accoutumée, en rangs dispersés, les festivités commémoratives se sont déroulées dans le calme et la sérénité. Aucun incident n'est à signaler. Mais on a remarqué que les autorités de wilaya ont déployé depuis quelques jours déjà un important dispositif sécuritaire autour du village Ifri. Et, afin, justement, d'éviter tout débordement de la situation, les pouvoirs publics ont adopté une stratégie salvatrice qui a, finalement, pu arranger tout le monde. Celle-ci consistait à programmer le passage de la délégation officielle à Ifri, tôt dans la matinée, et se contenter d'une virée furtive, sans prise de parole, encore moins un meeting, et céder ensuite le terrain politique à d'autres partis et autres organisations ayant un ancrage et une assise populaire dans la région. C'est vers 7h30 que le cortège officiel a démarré du chef-lieu communal d'Ouzellaguen, pour prendre la route vers Ifri, en arpentant le chemin sinueux fraîchement reclassé CW56, en référence à la date de la tenue du Congrès de la Soummam (1956). Accompagné du ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi, du secrétaire général de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), Saïd Abadou, du wali de Béjaïa, Ouled Salah Zitouni, et des membres de la famille révolutionnaire de la région, le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, a eu à inaugurer, officiellement, la fresque commémorative du double anniversaire de la Journée nationale du moudjahid, avant de dévoiler les statues des six principaux dirigeants de la Révolution ayant pris part au Congrès de la Soummam, à savoir : Abane Ramdane, Krim Belkacem, Zighoud Youcef, Larbi Ben M'hidi, Lakhdar Bentobal et Amar Ouamrane. Après avoir déposé une gerbe de fleurs devant le mémorial d'Ifri et observé une minute de silence à la mémoire des martyrs de la guerre de Libération nationale, la délégation officielle quitte les lieux pour redescendre à la ville d'Ighzer-Amokrane. Au passage, les représentants du gouvernement ont fait des escales dans deux villages, Didoune et Tiouririne, pour procéder à la mise en service du réseau du gaz de ville. La dernière halte du cortège officiel sera le Centre de formation professionnelle et d'apprentissage (CFPA) de la daïra d'Ifri-Ouzellaguen. Une fois sur les lieux, les mêmes responsables procéderont à la "baptisation" de l'établissement au nom du chahid Medjkoune Boudjemaâ, un ex-artificier de l'ALN, tombé au champ d'honneur. Ensuite, ils reprendront la route vers le chef-lieu de wilaya de Béjaïa, alors que le village d'Ifri continue encore de grouiller de monde. Des vagues de visiteurs ne cessaient d'affluer tout au long de la journée vers ce lieu historique. À noter que le Front des forces socialistes (FFS) a été l'entité politique qui aura marqué le plus cet événement. Une nuée de cadres et militants du parti, issus de pas moins de 16 fédérations (wilayas), s'est déplacée, hier, à Ifri. Outre la traditionnelle cérémonie de recueillement et de dépôt de gerbe de fleurs, le FFS a organisé un imposant meeting populaire sur l'esplanade du musée, animé respectivement par le député Rachid Chabati, le premier secrétaire national, Abdelmalek Bouchafa, et le député Ali Laskri, membre de l'instance présidentielle du parti. Dans leurs discours respectifs, les trois intervenants ont tenu à remettre sur le tapis leur projet politique, à savoir la reconstruction du consensus national, tout en appelant l'ensemble des acteurs politiques à "un dialogue sans exclusive". "Il n'y a pas d'alternative au consensus national sauf à rechercher le chaos. Nous demeurons optimistes. Le consensus national est inéluctable, il se fera avec, contre ou sans les forces qui s'y opposent. Nous ne croyons pas à des réformes où la répression politique et juridique étaie la répression économique", lancera le premier secrétaire national sous un tonnerre d'applaudissements. Avant d'enchaîner : "Nous nous prononçons pour un dialogue sans exclusive mais nous savons également faire preuve de toute la fermeté nécessaire quand il s'agit de la loyauté au serment de Novembre et de la Soummam, à nos engagements primordiaux et au respect de nos principes fondateurs. Nous n'y renoncerons jamais". L'orateur estimera, en outre, que "le Congrès de la Soummam a, en effet, été un grand événement politique ; un grand événement par la qualité des participants, un grand événement par l'importance des décisions prises. Ces décisions vont influer et influencer le cours ultérieur de la guerre de Libération nationale et pour certaines leur impact se fait encore sentir aujourd'hui. Je pense notamment à la question du primat du politique sur le militaire". Par ailleurs, M. Bouchafa tient à déplorer que "notre pays vit une situation difficile et périlleuse. Les questions de la légitimité, de la stabilité, de la cohésion nationale et de l'équité sociale, même posées dans un cadre national, continuent de ne recevoir que des réponses partiales et partielles. Elles pourraient, tout au moins, faire l'objet de débats démocratiques et citoyens pour éviter la résurgence des archaïsmes et des clivages dans la société". Pour sa part, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a tenu à mobiliser, lui aussi, ses troupes pour marquer ce 60e anniversaire du Congrès de la Soummam. Ainsi, une délégation de cadres et militants du parti, conduite par le président du bureau régional RCD de Béjaïa, Mouloud Deboub, a également fait le déplacement, hier, à Ifri, où ils ont déposé une gerbe de fleurs devant le monument érigé à la mémoire des martyrs de la Révolution. Notons que plusieurs autres formations politiques, des organisations de masse et des acteurs de la société civile, étaient aussi présents à ce rendez-vous avec l'histoire. On citera la présence des délégations du parti de Benflis (Talaie El-Houriat), le MPA de Benyounès, AHD-54, la Fondation du colonel Amirouche, la coordination des gardes communaux, celle des rappelés du service national... KAMAL OUHNIA