Le CET dans une configuration modeste dès son inscription restera un projet indésirable en dépit de son importance pour le traitement des déchets Décidément le centre d'enfouissement technique de Béjaïa ne finit pas de faire des vagues suscitant cette fois-ci la colère des citoyens de Oued Ghir qui ont procédé plusieurs fois à la fermeture de la RN12 en raison d'impacts écologiques qui auraient particulièrement touché le village périphérique de Hellil. Les premières mesures décidées et engagées entre autres pour le confinement des résidus de lixiviats, le traitement des nuisances olfactives et l'engagement de la procédure d'acquisition de la station de traitement par la commune de Béjaïa n'ont pas pu venir à bout de la détermination des citoyens qui ont lancé un appel pathétique au premier magistrat de la wilaya et réclamé l'envoi d'une commission indépendante, mettant ainsi implicitement en cause la conformité du CET en question. Même les mesures alternatives d'urgence envisagées à l'instar de la technique de l'osmose inverse pour le traitement des effluents n'ont pas permis de dissiper les doutes et la méfiance des contestataires. La protestation a même connu une dangereuse escalade conduisant carrément à l'entrave de l'accès au site obligeant tous les prestataires à faire évacuer leurs engins et les camions de collecte de la commune de Béjaïa à rebrousser chemin et procéder à des évacuations à la sauvette sur l'ancienne décharge de Boulimat en violation de son arrêté de fermeture pour cause de graves nuisances écologiques sur le littoral et la santé publique. La fermeture forcée du CET de Sidi Bouderhem et celle légale de la décharge de Boulimat dont l'utilisation ne saurait être envisagée place déjà les services d'hygiène de la collectivité de Béjaïa dans un état d'extrême tension qui ne manquera pas de s'exacerber de façon dangereuse à l'approche de la saison estivale. L'analyse rétrospective de la situation du centre d'enfouissement technique de Sidi Bouderhem est nécessaire pour identifier et lever tous les écueils pouvant justifier cette forte contestation. Inscrit au titre sectoriel de développement PSD en 2001 comme une opération d'étude et de réalisation de "décharge contrôlée" avec des dotations supplémentaires en 2002 et 2003, le statut de centre d'enfouissement technique est en fait hypothéqué limitant dès le départ sa consistance, et en corollaire sa longévité, aux aménagements d'un seul casier, de deux lagunes pour lixiviats, des réseaux de voirie et de blocs administratifs sans équipement de pesage, ni structure de tri et encore moins d'unité de traitement des effluents. Le système de lagunage restant insuffisant pour le traitement et la dégradation des pollutions des lixiviats, jus de percolation sous l'effet de la pluviométrie. Le CET dans une configuration modeste dès son inscription restera un projet indésirable en dépit de son importance pour le traitement des déchets en suscitant des oppositions systématiques à l'encontre des choix successifs de sites d'implantation pour ne citer que Oued Ghir, Ighil Neza sur le littoral et Ighzer Ouzemour. Ce dernier choix, objet de l'étude d'impact finalisée en 2008 et d'une enquête publique défavorable, a soulevé l'ire des populations et de la famille révolutionnaire pour cause de la charge historique du site de Bouchekroune obligeant la direction de l'environnement et les autorités concernées à décider en 2009 son déplacement sur le site actuel de Sidi Bouderhem qui a ses propres caractéristiques hydrographiques et géologiques. La décision de sa mise en service en septembre 2015, retardée pour inexistence de voirie d'accès, pose toutefois des questions sur les conditions d'application du protocole règlementaire prévu par les dispositions de la loi 03-10 du 19 juillet 2003 et du décret exécutif 06-198 du 31 mai 2006 pour la délivrance de l'autorisation d'exploitation d'une installation classée comme le CET qui prévoient des mesures et des investigations préalables pour la protection et la sauvegarde de l'environnement. D'autre part, après une durée d'exploitation aussi courte et aussi invraisemblable soit-il, si des écoulements de lixiviats sont réellement constatés en dépit du système de recyclage mis en place, les matériaux d'étanchéité et les moyens de drainage devraient être vérifiés pour détecter d'éventuels colmatages ou poinçonnements qui peuvent se produire en raison de charges hydrauliques exceptionnelles et de la nature hétéroclite des déchets déversés en absence de tri en interne et encore moins en amont. À ce sujet, le tri sélectif et la valorisation des déchets devraient être un défi majeur auquel devrait s'atteler la commune de Béjaïa, dont le gisement constitue plus de 90% des déchets évacués sur le CET. Les enveloppes sectorielles englouties très largement consolidées par la commune de Béjaïa, dont le concours va dépasser les financements de l'Etat qui risquent de s'amoindrir davantage, obligent la direction de l'environnement de wilaya en sa qualité de maître d'ouvrage à maintenir opérationnel le centre d'enfouissement technique de Sidi Bouderhem avec tous les aménagements techniques requis pour la préservation de la santé publique dont la dimension n'a pas de prix. Le caractère intercommunal du CET destiné à traiter le gisement des déchets de la daïra de Béjaïa exige d'autre part beaucoup plus de solidarité entre les des deux communes concernées qui ne peuvent se départir de leur mission nodale de gestion des déchets dans des décharges sauvages dont les nuisances sur l'écosystème sont plus dangereuses. L'implication de l'APW qui a délibéré favorablement pour la création de l'EPIC chargé de la gestion du CET est également plus que souhaitée. La gravité de la situation oblige tous les acteurs concernés, élus des deux collectivités, le mouvement associatif et la direction de l'environnement de wilaya à privilégier une approche consensuelle et à explorer les voies et moyens susceptibles de dissiper les craintes de pollution par une expertise qui aura pour objet l'évaluation objective des impacts constatés et des dispositifs de protection de l'environnement prévus par l'étude d'impact, quitte à rappeler si besoin est le bureau d'études concerné, la reconnaissance des travaux d'urgence qu'il faut engager rapidement pour regagner la confiance des citoyens et les actions d'investissements à moyen terme qui doivent faire l'objet d'un échéancier précis sur lequel toutes les parties doivent s'engager. Concertation qui doit se faire sous l'autorité du premier magistrat de la wilaya qui n'a pas manqué d'exprimer son entière disponibilité d'écoute et de dialogue, loin de toutes menaces de part et d'autre, de surenchères politiciennes, voire même de spéculation foncière, de manière à dégager concrètement les solutions durables à même de lever les inquiétudes et d'écarter les incertitudes. M. A. Enseignant universitaire Membre de la commission environnement de Béjaïa.