Lors de cette rencontre, l'écrivain-journaliste a abordé d'emblée le déchirement de l'exil durant la décennie noire où l'intelligentsia algérienne était face au dilemme de "la valise ou le cercueil" Partir, c'est mourir un peu, disait le poète. C'est cette problématique de l'exil et du déracinement qui a été au centre des débats à l'occasion de la conférence animée par l'écrivain-journaliste Arezki Metref, dimanche dernier à Montréal, où il a également dédicacé ses deux derniers livres : La traversée du somnambule (Editions Koukou) et Le jour où Mme Carmel sortit son revolver (Editions Dalimen). L'orateur abordera d'emblée le déchirement de l'exil durant la décennie noire où l'intelligentsia algérienne était face au dilemme de "la valise ou le cercueil". Arrivé à Paris durant le grand flux migratoire du début des années 1990, M. Metref, aujourd'hui chroniquer au Soir d'Algérie, dit être revenu de ses illusions sur l'exil. Paris était alors La Mecque des exilés politiques. L'ancien journaliste d'Algérie-Actualités découvre dans les boulevards rectilignes de Paris des anciens du maquis du FFS, des rescapés de l'ORP (Organisation de la résistance populaire), des anciens du PRS de Boudiaf, des membres de l'Académie berbère, des militants autonomistes, des animateurs associatifs du mouvement culturel, etc. Autant dire presque toutes les strates géologiques de l'opposition politique algérienne. Ce dessaisissement, selon le mot de Arezki Metref, a entraîné un certain déclassement social. "C'est dans ce contexte de dessaisissement que certains ont eu recours à la thérapie de l'écriture", explique l'intervenant, avant d'ajouter : "En fréquentant ce monde, j'ai découvert beaucoup de souffrances que j'ai eu par la suite à vivre". "Je me suis rendu compte que l'exil n'était pas cette espèce de villégiature pour tous ceux qui ont été persécutés en Algérie. Autant il était un cimetière des rêves d'où il fallait s'extraire, autant l'exil était pour moi une vraie leçon d'humilité", estime-t-il. "Comment dans ce cas donner du sens à l'acte d'écrire la patrie ?", s'interroge encore l'orateur. Pour ce dernier, l'arrivée massive d'Algériens exilés à Paris a été à l'origine d'une littérature de l'urgence qui participe à une construction laborieuse de la mémoire. C'est que l'exil constitue un "choc émotionnel" qui favorise l'expression, dira le conférencier qui est revenu longuement sur l'épopée de l'hebdomadaire Algérie-Actualités. "Une jeune élite est née avec une œuvre littéraire de ces soubresauts de la tragédie subie dans la chair par la société algérienne. Ce qui fait qu'aujourd'hui l'exil finit par devenir une patrie en soi", avoue Metref qui dit ne pas avoir encore fait le deuil du journal Ruptures qui n'a pas survécu à son directeur de rédaction, Tahar Djaout, assassiné un certain 26 mai 1993. Y. A.