Il faut à présent établir les niveaux de production applicables à chacun des pays, s'assurer de leur respect et convaincre les pays non-membres de l'Opep, principalement la Russie, deuxième producteur mondial de brut, de participer aux efforts du rééquilibrage. La remontée des prix du pétrole, dans le sillage de l'annonce de l'accord d'Alger sur la limitation de la production des pays membres de l'Opep, aura été de courte durée. Dès le lendemain, les prix ont rechuté. Les cours du brut ont renoué hier avec la tendance baissière et les marchés pétroliers sont restés dans l'expectative en raison des incertitudes qui entourent toujours les modalités d'application de l'accord de mercredi soir. Les inquiétudes ont trait à la date ou période de l'amorce de la baisse de production, à la répartition des quotas, mais aussi au comportement des pays non-Opep qu'il reste à convaincre d'appuyer la stratégie de l'Opep. Les marchés qui ont déjà intégré l'ensemble de ces facteurs, pourraient rester hésitants le temps que soit consolidé un arrangement global définitif. Ce qui attendra forcément la prochaine réunion de l'organisation prévue à Vienne pour voir les prix dépasser le seuil des 50 dollars le baril. Et en attendant, le marché refuse de s'affoler. Au cours de la matinée d'hier, le baril de Brent de la mer du Nord valait 48,29 dollars, en retrait de 95 cents par rapport à la clôture de jeudi. Ainsi même si les prix du pétrole sont remontés à 49 dollars mercredi, immédiatement après l'annonce de l'accord de l'Opep sur la limitation de la production, les prix pour l'heure n'ont pas atteint le seuil des 50 dollars. Il faut dire, d'ailleurs, que la conclusion de l'accord d'Alger, qualifié d'historique, n'a pas été aisée. Il n'est intervenu qu'au terme de plusieurs semaines de tractations et d'une réunion informelle de près de six heures, les pays membres de l'Organisation des pays exportateurs du pétrole (Opep) sont parvenus, mercredi, en marge du 15e Forum international de l'énergie d'Alger. Alors que les marchés s'attendaient à un échec des négociations, les 14 pays qui composent l'Opep ont transformé une réunion informelle en séance extraordinaire pour permettre une prise de décision jugée historique. Cet accord est historique, d'abord, parce que c'est une surprise. En effet, les analystes jugeaient un accord d'autant plus improbable que, dès la veille de la réunion, l'Arabie saoudite et l'Iran avaient douché les espoirs d'un accord. Ensuite, parce qu'il s'agit de la plus grosse réduction de production depuis celle décidée après la chute des cours durant la crise économique de 2008. Enfin et c'est le plus important, l'Opep retrouve son rôle de régulateur du marché. L'organisation avait, depuis longtemps, abandonné ce rôle pour adopter une stratégie de défense des parts de marché, en ouvrant à fond les robinets aux dépens des prix. En clair, l'accord acte une réduction de 700 000 barils/jour de la production, soit entre le tiers et la moitié de l'excès d'offre mondiale selon les estimations. De plus, l'Opep marque un tournant dans sa stratégie qui privilégie la part de marché à un éventuel objectif sur les prix, ajoutent les spécialistes. Pour parvenir à un accord qui stabiliserait la production des pays de l'Opep entre 32,5 et 33 millions de barils/jour, contre 33,47 mbj en août, l'Iran a accepté de geler sa production en deçà de l'objectif affiché jusqu'à présent, tandis que l'Arabie saoudite devra baisser sa production. Les deux pays auraient donc mis de côté leurs différends au vu de la pression qu'exerce le bas niveau des cours du brut sur les finances de plusieurs membres de l'organisation. Les modalités de mise en œuvre de cet accord seront discutées lors du sommet de l'Opep à Vienne, le 30 novembre prochain. Un comité de haut niveau va notamment être mis en place pour déterminer les niveaux de production applicables à chacun des pays. Il faudra s'assurer ensuite que chacun respecte ses nouveaux quotas. Un chantier auquel il faut s'atteler. Autre défi : engager le dialogue avec les pays non- membres, principalement la Russie, deuxième producteur mondial de brut, pour participer aux efforts du rééquilibrage. Là aussi, la tâche ne sera pas de tout repos d'autant que la Russie ne semble pas prête à baisser ses niveaux de production actuels. L'annonce de cette nouvelle a immédiatement fait grimper les cours du brut, qui ont clôturé en nette hausse à New York, alors que les marchés s'attendaient, au contraire, à ce que la réunion informelle d'Alger aboutisse à un constat de désaccord. Le cours du baril de référence (WTI) aux Etats-Unis a gagné 2,38 dollars, à 47,05 dollars, sur le contrat pour livraison en novembre. À Londres, le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison à même échéance a également progressé de 2,72 dollars, à 48,69 dollars. Jeudi, les cours du pétrole ont, également, fini en hausse. Le cours du baril de Light Sweet Crude (WTI), référence américaine du brut, a gagné 78 cents à 47,83 dollars sur le contrat pour livraison en novembre au New York Mercantile Exchange (Nymex). À Londres, le prix du baril de Brent de la mer du Nord, pour livraison en novembre, a également progressé de 55 cents, à 49,24 dollars sur l'Intercontinental Exchange (ICE). La hausse des cours a toutefois été modérée, des investisseurs s'interrogeant sur la mise en place concrète de cette décision qui ne sera pas acté dans l'immédiat. Les marchés se tournent désormais vers la réunion de l'Opep à Vienne, fin novembre, pour découvrir les actions qui seront prises. Goldman Sachs estime que l'accord conclu mercredi, s'il est mis en œuvre, devra gonfler les cours de 7 à 10 dollars le baril au premier semestre 2017. S. S.